La production de légumes destinés à la transformation en conserve ou en surgelés connaît un contexte inédit. « Alors que nous avons toujours eu plus de surfaces semées par rapport au prévisionnel annoncé, ce n’est plus du tout le cas depuis ces deux dernières années. C’est complètement nouveau », observe Jean-Claude Orhan, vice-président de l’Unilet, l’interprofession des légumes en conserves et surgelés, en conférence le 9 février 2023 à Paris.

4 500 producteurs de légumes dans la filière

Ce constat est « un point d’alerte », selon lui. « Il faut se demander pourquoi les producteurs jettent l’éponge », insiste-t-il. Il faut dire que la production n’a pas été épargnée par la sécheresse et les restrictions d’irrigation en 2022. La récolte de petits pois s’est repliée de 8 % en 2022 comparativement à 2021, et celle de haricots (vert et beurre) a été en retrait de 16 %. « Jusqu’à 40 % sur certains secteurs, du jamais vu », remarque Jean-Claude Orhan. Outre le rendement, la qualité de la récolte a été impactée : les pois étaient par exemple trop durs, et les haricots avaient trop de fils.

Manque d'eau

La filière est très exposée au changement climatique. « On est sur des cultures de plein champ, avec des cycles très courts. La plante n’a pas la capacité à résister à la sécheresse. Le moindre manque d’eau est fatal », ajoute Jean-Claude Orhan. Alors que les besoins en eau sont croissants, les restrictions sont aussi de plus en plus fréquentes. Pour l’interprofession, l’accès à l’eau est un enjeu majeur. En 2022, faute d’irrigation, 3 % des surfaces n’ont pas été emblavées.

Retrait de matières actives

La filière alerte également sur la protection des cultures. Selon elle, 70 % des substances actives risquent un retrait dans les deux ans à venir. La recherche est très active pour trouver des solutions alternatives : la filière y consacre les trois quarts de son budget, et demande des moyens supplémentaires pour aller plus vite. Si l’interprofession ne s’oppose pas aux interdictions, elle réclame une réglementation plus juste et opérationnelle.

Coûts de production

Engrais, carburant, énergie, emballages… Producteurs comme industriels subissent aussi une forte hausse de leurs coûts de production. « La pérennité de la filière est menacée », insiste Cyrille Auguste, président de l’Unilet. Sa compétitivité se dégrade en effet depuis vingt ans. En 2022, la balance commerciale était déficitaire, à –260 millions d'euros, contre –58 millions d'euros en 2002, conséquence d’une baisse des exportations.

Reconquête de souveraineté

L’Unilet a participé à la construction du plan de souveraineté alimentaire consacré aux fruits et légumes, qui sera révélé lors du Salon de l’agriculture. « Le ministre de l’Agriculture nous a demandé de nous positionner sur des objectifs réalistes à l’horizon de 2030, indique Cécile Le Doaré, directrice générale de l’Unilet. Nous en avons ciblé deux : reconquérir des capacités productives, en développant de 15 % la production et la transformation française actuelle, et augmenter la consommation des plus petits consommateurs de légumes, ce qui implique une hausse de production et transformation de 11 %. » Au total, la filière devra augmenter ses capacités de production de 200 000 tonnes d’ici à 2030.