«En 2011, quand nous avons créé La chèvrerie des demoiselles, nous avons choisi de produire du lait 12 mois sur 12 pour fabriquer des fromages toute l’année, expliquent Gaëtan et Violaine Mazenq, installés à Montoulieu (Hérault). C’est un avantage pour fidéliser les clients. Les rentrées d’argent sont étalées, ce qui allège la trésorerie. Et le travail, régulier, facilite l’embauche d’un salarié permanent. »

Aujourd’hui, ils élèvent 85 chèvres, en répartissant la lutte sur trois périodes : décembre-janvier, mai-juin et septembre-octobre. « En mai et en septembre, à contre-saison, j’insémine un petit lot avec groupage des chaleurs pour avoir des chevrettes de renouvellement. Quinze jours après, je mets les boucs dans le reste du lot à saillir. Je les laisse deux mois, cela fonctionne bien », détaille Gaëtan. Les mises bas se répartissent sur octobre-novembre, février-mars et mai-juin. « Cela fait trois périodes à gérer au lieu d’une. Mais il y a moins d’animaux à chaque fois, ce qui allège le travail. »

Pour étaler la production, les deux éleveurs misent aussi sur les lactations longues. « Tarir une chèvre qui fait encore 3 à 4 l/j n’est pas facile. Nous avons été confrontés à des mammites, avec des chèvres longues à tarir qui ne repartaient pas bien en lactation à la mise bas suivante. Depuis, tant qu’elles produisent plus de 3,2 l/j, je ne les taris pas et j’attends pour les remettre à la reproduction. Tous les 45 jours, après le contrôle laitier, je regarde la production de chaque chèvre et je décide de prolonger ou non sa lactation. » La durée de lactation varie de 8 à 36 mois, et elle dépasse 10 mois pour un quart des animaux. Ce système impose une gestion par lots. « Actuellement, il y en a huit », précise-t-il. Pour séparer les chèvres vides de celles en début ou en fin de gestation, il fait faire des échographies. « Cela me permet de tarir ensemble celles qui sont au même stade de gestation. »

En lactation longue, l’alimentation doit être très régulière pour bien maintenir le lait. La ration est constituée de ligneux consommés sur les parcours, de 2 kg/j de foin et de 380 g/l de concentré en moyenne. « Dans l’AOP Pélardon, nous ne devons pas dépasser 400 g/l », explique Gaëtan. La quantité est modulée en fonction de la production, qui varie entre 2,5 et 5 l/j.

Débouchés réguliers

Le couple n’a pas constaté de fatigue des chèvres en lactation longue. « Elles restent en état, car elles n’ont pas à mener de gestation en même temps que la lactation. » Le nombre de jours improductifs est réduit, celui des chevreaux aussi. « Mais notre objectif pour dégager un revenu est avant tout de produire du lait », souligne Gaëtan.

Le but est d’obtenir environ 220 l/j à transformer. « Nous n’arrivons pas à lisser complètement, mais sur l’année, la variation ne dépasse pas 70 l/j », précise Gaëtan. Ils évitent ainsi d’avoir à écrêter un pic de lactation en produisant des stocks de tomme ou en reportant du caillé.

Dans l’AOP Pélardon, l’affinage est de onze jours minimum. « Notre cycle de production et de vente est rapide, avec une clientèle diversifiée qui nous permet de valoriser tous les stades d’affinage », précise Violaine. Avec deux circuits de livraisons complémentaires sur Montpellier et sur l’arrière-pays, les débouchés restent réguliers au fil de l’année.

Les journées de travail sont bien remplies toute l’année. « En 2016, nous avons construit un bâtiment plus fonctionnel. La fromagerie et les animaux sont regroupés sous un même toit, bien isolé, avec plus de volume d’air pour limiter la température l’été. » Pour gagner du temps, les deux éleveurs ont mécanisé le paillage et investi dans un pasteurisateur-distributeur de lait pour les chevreaux.

La chèvrerie a coûté 222 000 € et la fromagerie 175 500 €. « Ces investissements étaient nécessaires pour ne pas s’user au travail », note Gaëtan. Pour les financer, il a fallu agrandir le troupeau, mais cela a permis d’employer la salariée permanente 35 heures par semaine, contre 20 heures précédemment. « Aujourd’hui, notre organisation est bien calée. Et la salariée peut nous remplacer deux ou trois jours lorsque nous avons besoin de souffler un peu. C’est appréciable ! »