«Mi-février, quand j’ai passé la houe rotative dans les orges, le vent soufflait fort. Je n’aurais pas pu appliquer un désherbant, raconte Alain Marty, céréalier à Puginier, dans l’Aude, et membre d’un groupe de fermes Dephy. En intervenant mécaniquement, j’ai éliminé les adventices au bon stade, tout en aérant le sol. Cela va favoriser son réchauffement et améliorer le démarrage des plantes. Le désherbage mécanique est plus lent, mais je n’ai pas perdu mon temps. »
Sur 160 hectares, Alain cultive du blé dur, du blé tendre, de l’orge, du colza, du tournesol et du sorgho. Il avait déjà une bineuse et, en 2016, il s’est équipé d’une herse étrille en 12 mètres de large et d’une houe rotative en 6,40 mètres. Mais il ne s’interdit pas pour autant le désherbage chimique quand c’est nécessaire.
Dans les orges et les blés, l’agriculteur positionne une application de Défi et de Compil en postsemis-prélevée. Quand l’état du sol le permet, il complète dans les jours qui suivent par un désherbage mécanique. « Je privilégie la houe rotative dans les sols battants ou tassés », note-t-il. Dans les sols soufflés, par contre, la herse étrille convient mieux. Si la parcelle est trop humide pour passer ces outils, le désherbage chimique réalisé avant la levée lui évite de se faire déborder par les adventices.
Bonne complémentarité
L’association de ces deux modes de désherbage en début de culture est très efficace. « Le désherbage chimique retarde la levée des adventices, explique Loïc Doussat, de la chambre d’agriculture de l’Aude, qui anime ce groupe Dephy. Cela permet d’intervenir mécaniquement au bon stade sur de jeunes plantules de ray-grass, alors que les céréales ont plus de trois feuilles et craignent moins le passage des outils. »
En nettoyant bien les adventices en début de saison, Alain Marty a moins de rattrapage à effectuer au moment où il démarre les traitements fongicides. « Je fais plus d’heures de tracteur dans l’hiver, à cause du désherbage mécanique, mais je réduis ensuite le pic de travail au printemps », apprécie-t-il. A cette période, il réserve les heures du matin aux applications chimiques et désherbe mécaniquement l’après-midi. Dans les orges, la culture couvre rapidement le sol. « Après le premier désherbage chimique, j’arrive à tenir 90 % des parcelles propres avec deux à trois passages d’outils », note le céréalier. Dans les blés, en revanche, il est parfois obligé de rattraper avec un antigraminées ou un antidicotylédones. Seuls les blés durs en contrat semence sont désherbés uniquement de façon chimique. Dans les autres blés, Alain privilégie le désherbage mécanique, dès que l’état du sol s’y prête. « En 2018, avec des pluies très fréquentes, les sols n’arrivaient pas à ressuyer. J’ai dû revenir au désherbage chimique », confie-t-il.
Dans les tournesols, il arrive à désherber mécaniquement 95 % des surfaces. « Je fais un premier désherbage chimique au semis, avec du Prowl 400 ou de l’Atic Aqua, uniquement dans les petites parcelles, précise l’exploitant. En manœuvrant pour passer la herse ou la houe, je ferais trop de dégâts sur les jeunes plants en bordure. » Ensuite, Alain revient au désherbage mécanique. Dans cette culture, il utilise surtout la houe ou la herse, et ne sort la bineuse, plus lente à passer, que pour réduire les chardons.
En combinant ces deux modes de désherbage, l’agriculteur a réduit ses achats de produits. « Pour positionner les passages d’outils, j’observe plus les adventices, explique-t-il. De ce fait, quand je dois aussi intervenir chimiquement, je choisis mieux les matières actives. Cela me permet d’être efficace avec des produits ciblés et moins chers. Grâce à ces économies, j’ai amorti la herse étrille et la houe rotative en trois ans. »
Frédérique Ehrard