C’est du jamais vu. Le 21 mars 2022, le cours du porc en Allemagne enregistrait un bond de 65 centimes en cinq semaines, entraînant dans son sillage la plupart des autres places de cotation. Si bien qu’en France, le Marché du porc breton (MPB) a dû adapter sa convention.

« La variation maximale du cours de six centimes par semaine [dont 5 centimes pour la vente du jeudi, NDLR] ne permettait pas de suivre ces hausses, explique Pascal Le Duot, directeur du MPB. Dans ce contexte exceptionnel, deux commissions paritaires ont été réunies pour aboutir, lors de la séance du 17 mars, à un relèvement de cette borne de prix sur une durée de trois semaines. » La variation de prix maximale a été portée à 11 centimes par semaine, dont 10 centimes pour la vente du jeudi. De quoi « libérer » la référence française. Entre le 14 et le 31 mars, le cours du porc a progressé de 24,9 centimes, passant de 1,415 à 1,664 €/kg.

Déprise généralisée

L’origine de l’envolée du cours allemand, amorcée à la mi-février, se situe d’abord dans un déficit d’offre, couplé à un regain de la demande. Les difficultés que subit la filière depuis deux ans (pandémie de Covid-19, fermeture de débouchés à l’export en raison de la peste porcine africaine) ont accéléré la chute de la production. En 2021, l’effectif de truies du pays a reculé de 7,3 % sur un an. En France, « les résultats de l’enquête cheptel du service statistique public (SSP) sont édifiants, rapporte l’Institut du porc (Ifip). Les effectifs totaux de porcs et de truies chutent respectivement de 3,4 % et 3,8 % en un an. »

À l’échelle européenne (UE à 27), le cheptel porcin total s’établissait à 141,5 millions de têtes fin 2021, en repli de 3 %. Seule l’Espagne tire son épingle du jeu, avec un cheptel de reproducteurs en hausse (voir l’infographie).

Hausse des charges

Depuis fin février, la guerre en Ukraine est venue ajouter de l’instabilité à ce contexte (lire l’encadré ci-dessus). « L’incertitude est forte sur les besoins en viande, mais aussi sur les disponibilités futures, ce qui devrait maintenir les cours à des niveaux soutenus, indique Pascal Le Duot. Car la flambée des matières premières alimentaires pourrait encore affecter l’offre. Des opérateurs espagnols s’inquiètent de la capacité des éleveurs à produire dans ces conditions. »

Le conflit russo-ukrainien n’a fait qu’accentuer une situation déjà tendue. D’après Agreste, le service de la statistique du ministère de l’Agriculture, en janvier 2022, le prix de l’aliment pour porcins dépassait déjà de 18 % le niveau de l’an dernier et de 26,5 % celui de la moyenne quinquennale.

Vincent Guyot