« Les prix du blé tendre ont connu une forte dépréciation, particulièrement au début de 2024 », indique Emna Troudi, chargée d’études économiques sur les céréales biologiques chez FranceAgriMer. L’organisme a fait un point à la presse sur le sujet le 11 juillet 2024 à l’issue de son conseil spécialisé des grandes cultures.

Difficulté de trouver de nouveaux débouchés

« Les prix diminuent depuis 2021 de manière continue », commente-t-elle. Ils affichent un écart d’environ 150 €/t entre le printemps 2021 et le printemps 2024. Cela s’explique par « une difficulté de trouver des nouveaux marchés et de l’augmentation continue de la collecte », explique-t-elle.

Les exportations de blé tendre bio ont bondi il y a quelques années, passant de 3 000 tonnes en 2020-2021 à 42 500 tonnes en 2021-2022. Ce débouché freinerait en 2023-2024 : selon les bilans prévisionnels de FranceAgriMer par le groupe interprofessionnel, elles atteindraient ainsi 60 000 tonnes, contre environ 70 800 tonnes en 2022-2023. Les volumes collectés, quant à eux, sont plutôt stables : 425 000 tonnes (dont 21 500 tonnes en deuxième année de conversion, ou C2) en 2023-2024, contre 424 902 tonnes (dont 40 787 tonnes en C2) en 2022-2023.

Hausse de la collecte et manque de débouchés tirent les prix du blé tendre biologique à la baisse ces dernières années. (©  FranceAgriMer)

Selon Emna Troudi, la baisse des prix est « généralisée pour la majorité des céréales bio », avec néanmoins des spécificités pour certaines cultures. Une hausse des prix a par exemple été constatée cette année pour l’orge bio française, qui était plus compétitive que celles des pays voisins. La tonne d’orge biologique rendu Rouen s’affichait aux environs des 230 € en mai 2024, contre environ 200 € en janvier 2024. Elle a retrouvé ce niveau de prix en juillet 2024. Et la tendance générale est globalement à la baisse ces dernières années : la tonne atteignait jusqu’à 400 € en mai 2022.

La collecte de céréales bio stagne

« Depuis 2021, la collecte de céréales bio s’est stabilisée aux alentours de 800 000 tonnes », chiffre Emna Troudi. La part de la collecte en conversion diminue ces dernières années (seulement 6 % en 2023-2024, contre 33 % en 2019-2020), accompagnant le ralentissement des conversions des exploitations céréalières.

D’après l’Agence bio, les surfaces céréalières certifiées bio atteignaient 499 798 ha en 2023, en hausse de 6,2 % par rapport à l’année précédente. « Cependant, celles en conversion ont diminué de 40,8 % sur la même période », à 49 578 ha, note Emna Troudi. Le nombre de céréaliers engagés est passé de 20 443 en 2022 à 20 460 en 2023. « On observe une diminution de 2,2 % du nombre d’exploitations céréalières », souligne-t-elle, avec 399 exploitations sorties et 228 arrivées.

Une baisse de 10 % à 20 % de la collecte anticipée

Emna Troudi souligne que les experts ont des inquiétudes sur la qualité des céréales biologiques pour la récolte de 2024, avec « des problèmes de salissement, de fertilisation et de maladies ». Elle juge que « cela impactera le taux d’engagement pour les prochaines campagnes et favorisera les déconversions structurelles. Les experts des marchés bio estiment que la collecte pourrait diminuer de 10 % à 20 %. »