L’écart de prix entre les céréales françaises et russes se réduit, mais la demande à l’exportation tarde à démarrer. Le complexe oléagineux est sous la pression des fortes disponibilités en huiles végétales et l’amélioration des conditions des cultures de soja en Amérique du Sud.

Légère baisse du prix du blé en ce début d’année

Depuis le début de l’année, les prix du blé français ont continué de s’effriter. Sur une semaine, le blé rendu Rouen a perdu 1 €/t, à 212,5 €/t (base : juillet, échéance : mars 2023). Le blé rendu La Pallice a perdu 2 €/t, à 212,5 €/t également. Les blés européens et notamment français continuent de faire face à la concurrence des origines de la mer Noire, principalement russes.

Selon la Commission européenne, la France n’a exporté que 3,5 millions de tonnes de blé entre le 1er juillet et le 31 décembre 2023, contre 7,2 millions de tonnes l’an dernier sur la même période. Néanmoins, compte tenu du risque géopolitique et des mauvaises conditions météorologiques persistantes en mer Noire, le blé français a récupéré un peu de compétitivité.

Sur le marché mondial, le blé Fob Rouen a perdu 2 $/t, à 247 $/t. Il est désormais seulement 6 $/t plus cher que le blé Fob russe à 11,5 % de protéines, coté à 237,5 $/t, et 1 $/t plus cher que le blé Fob russe à 12,5 % de protéines. Ce dernier a augmenté de 5 $/t, à 242,5 $/t.

Les exportations françaises n’ont pour le moment pas encore bénéficié du ralentissement des expéditions russes, principalement dû aux mauvaises conditions météorologiques. Jusqu’à présent, c’est plutôt l’origine ukrainienne qui en a profité avec un corridor maritime qui a bien fonctionné en décembre où près de 1 million de tonnes ont été expédiées par bateau sur le mois.

Face à des disponibilités de blé importantes en mer Noire et en Europe, les prix restent tout de même soutenus compte tenu du conflit en mer Rouge qui perturbe les flux commerciaux mondiaux. Les températures hivernales actuelles en Europe suscitent aussi quelques inquiétudes, notamment pour les blés semés tardivement. Le marché est également dans l’attente du rapport de l'USDA (ministère américain de l’Agriculture) qui sera publié ce soir.

Les cours de l’orge se stabilisent

Depuis le début du mois, le prix de l’orge fourragère rendu Rouen a peu évolué pour terminer la semaine à 191 €/t (base : juillet). À l’exportation, l’orge française s’affiche à 218 $/t Fob Rouen. L’origine française réduit l’écart avec les orges russes qui ont gagné 5 $/t, pour s’élever à 192,5 $/t Fob Novorossiysk.

Comme souvent à cette époque de l’année et comme pour le blé, les expéditions d’orge au départ des ports russes de la mer Noire sont ralenties par les mauvaises conditions météorologiques. Cela pourrait relancer la demande des origines d’Europe de l’Ouest, même si pour le moment, c’est encore l’origine ukrainienne qui en profite le plus. Ce sont ainsi près de 150 000 tonnes d’orge ukrainienne qui ont été expédiées par voie maritime en décembre.

Du côté français, les exportations vers les pays tiers ont bien ralenti depuis la fin de novembre, surtout vers la Chine, alors que l’Australie prend maintenant le relais vers cette destination. Ce sont surtout les exportations intracommunautaires d’orges françaises qui ont jusqu’à présent subi la concurrence des autres origines, notamment ukrainienne et roumaine.

En ce début d’année, plusieurs pays sont revenus aux achats pour profiter de prix qui restent au plus bas depuis le début de la campagne. Ainsi, la Tunisie a lancé un appel d’offres de 50 000 tonnes d’orge fourragère et l’Algérie un appel d’offres de 30 000 tonnes. Concernant la nouvelle récolte, le froid hivernal en Europe suscite quelques inquiétudes autour de l’état des orges d’hiver, même si ce froid n’a finalement rien d’inhabituel.

De son côté, l’orge brassicole d’hiver Fob Creil affiche une baisse de 5 €/t, à 201 €/t (récolte de 2023), tandis que l’orge brassicole de printemps est en retrait de 1 €/t, à 295 €/t. Cette dernière affiche une nette décote à 260 €/t pour la récolte de 2024, décote qui reflète le rebond attendu de la récolte européenne (+40 % par rapport à 2023).

Net recul des prix du tourteau de soja

Depuis la semaine dernière, les cours du complexe soja ont évolué à la baisse, tirés vers le bas par les bonnes conditions des cultures en Amérique du Sud et les faibles ventes hebdomadaires des États-Unis. Les prix mondiaux de la fève ont ainsi nettement reculé, entraînant dans leur sillage ceux du tourteau.

Au Brésil, des pluies abondantes ont arrosé les régions initialement affectées par des températures extrêmes et le sec, notamment au Mato Grosso, principal bassin de production. Cela devrait être bénéfique pour les cultures qui sont dans leur phase critique de développement (floraison et remplissage des gousses).

Malgré la révision à la baisse cette semaine des estimations de production de la Conab (l’agence nationale d’approvisionnement au Brésil), la production de soja au Brésil reste toujours attendue à un niveau record avec des prévisions avoisinant les 155 millions de tonnes.

En Argentine, les prix des tourteaux de soja ont diminué de plus de 20 $/t sur l’échéance de février 2024, à 435 €/t. Les bonnes perspectives de récolte, toujours attendue en net rebond comparée à l’an dernier, continuent de peser sur les cours de la graine et du tourteau.

La demande mondiale inquiète toujours les opérateurs du marché. Les prévisions de croissance économique restent moroses et la demande chinoise peine à s’activer. Les ventes hebdomadaires des États-Unis témoignent du faible dynamisme du marché avec des exportations de tourteaux de soja à seulement 65 000 tonnes pour la semaine se terminant le 4 janvier.

Cela représente une baisse de 20 % par rapport à la semaine précédente, et de 68 % comparativement à la moyenne de quatre semaines précédentes. Les prix du tourteau de soja américain ont par conséquent perdu 22 $/t sur la semaine. Suivant la tendance baissière des cours mondiaux, le prix du tourteau de soja à Montoir a cédé 14 €/t, à 478 €/t.

Baisse des cours du colza

Cette semaine, les prix du colza ont enregistré une baisse de plus de 4 €/t sur les échéances Euronext de février et mai 2024. Ils s’établissent à respectivement 426 €/t et 428 €/t, au 11 janvier 2024. La baisse des cours cette semaine est notamment liée à la diminution des prix du soja : les bonnes précipitations tombées au Brésil ont rassuré les opérateurs.

Les cours européens du colza ont également diminué en raison des flux d’importation toujours soutenus depuis l’Ukraine, mais également avec l’arrivée sur le marché de la récolte australienne. De plus, au sein de l’Union européenne, la trituration de colza et de tournesol reste assez soutenue, générant des disponibilités abondantes en huiles. Le cours de l’huile de colza dans l’Union européenne a ainsi diminué sur la semaine et impacté à la baisse les prix de la graine.

Toutefois, la baisse des prix du colza cette semaine a été limitée par la hausse des prix de l’huile de palme. En effet, en Malaisie, le stock d’huile de palme a baissé de 4,6 % entre la fin de novembre et la fin de décembre, principalement en raison d’une baisse de la production de plus de 13 %.

À suivre : conditions météorologiques en Amérique du Sud (soja, maïs), en Europe (céréales d’hiver, colza), situation géopolitique en mer Noire, tensions en mer Rouge, prix du pétrole, conjoncture économique mondiale, parité euro/dollar.