La transformation et la vente directe ont permis à Katharina de vivre sa passion : l’agriculture et la fabrication de fromages fermiers. Une activité impossible dans son pays natal, l’Allemagne. « Dans les années quatre-vingt, le foncier y était inaccessible et la production de fromages au lait cru interdite », explique Katharina.

Après une première association en Gaec pendant dix-neuf ans à Hauteville-Lompnes (Ain), Katharina s’est réinstallée en 2007 à Vieu, 20 km plus loin. Elle ne dispose alors que de 15 ha (1), de 20 brebis laitières ainsi que de 18 chèvres. Les animaux ont été abrités sous un tunnel, en attendant que la construction d’une bergerie et d’une fromagerie soit terminée en janvier 2008.

À Vieu, Katharina est bien accueillie. André Petroud, devenu par la suite son conjoint, l’a aidée à faire ses premiers foins. « Je connaissais déjà la transformation fromagère pour l’avoir pratiquée pendant dix-neuf ans et je disposais d’un peu de capital tiré de la vente de l’exploitation d’Hauteville, souligne l’éleveuse. J’ai emprunté 30 000 €. Les premières années ont été denses. Le point de vente de produits fermiers de Belley avec lequel je travaillais déjà m’a conservé un créneau pour mes produits. Je me suis vite fait une clientèle supplémentaire sur le marché de Champagne-en-Valromey, une bourgade vivante de 1 000 habitants qui a conservé la plupart de ses commerces. »

En 2012, quand Katharina et André, dont le frère partait en retraite, ont mis en commun leurs exploitations, l’activité de transformation et de vente directe a été renforcée. « Nous avions les circuits de vente, précise Katharina. Pour élargir la gamme de produits, nous nous sommes équipés d’une cuve pour réaliser des pâtes pressées cuites. » Un projet dont rêvait l’agricultrice depuis longtemps. Le couple a laissé une partie des terrains les plus éloignés et il a vendu 30 des 45 vaches d’André. À l’époque, leur lait, collecté par la laiterie de Leyment, est mal payé. Transformé en fromages fermiers, il est bien mieux valorisé. Aujourd’hui, avec l’aide d’André et d’une salariée, Katharina transforme le lait de 44 chèvres et de 15 vaches en une large gamme de fromages.

Fromages au nom patois

Certains fromages sont des créations, comme le Tsarveron, une spécialité tirant vers le morbier. Katharina aime donner à ses fromages, des noms en patois. Le Pyramion, une pâte pressée cuite reprend ainsi le nom d’un gros rocher qui domine la fromagerie. Pour la bergère de Munet, lieu-dit où est implantée sa fromagerie, c’est une façon de conserver le parler local.

Les brebis laitières de la ferme ont été vendues en 2016 pour permettre à quatre jeunes, sortant d’une école d’ingénieur agricole, de s’installer à proximité. Hors cadres familiaux, ils fabriquent du fromage de brebis et du pain. Katharina et André se réjouissent de voir arriver des jeunes, et donc de la vie, dans le pays. Pour les aider, le couple leur a laissé un peu de terrain dont des parcelles labourables, et leur a prêté du matériel. L’entraide s’est développée. « Nous faisons ensemble deux marchés, précise l’éleveuse. L’été, à deux, nous ne chômons pas. L’hiver, nous nous relayons une fois tous les quinze jours pour tenir le stand. Et nous nous entraidons pour le transport des produits à l’Amap. »

À 54 et 53 ans, Katharina et André commencent à réfléchir à la transmission de leur chèvrerie et de leur élevage. « On aime ce que l’on fait. Mais on voudrait lever un peu le pied. La traite des deux troupeaux tous les jours ça commence à peser, même si les chèvres sont taries deux mois de l’année. »Ils déplorent aussi les lourdeurs administratives. « Nous avons choisi ce métier car nous voulions travailler dans la nature avec les animaux, et pas au bureau. Or, nous nous retrouvons de plus en plus souvent à faire de la paperasse, estime André. Dans un territoire difficile comme le nôtre, il n’est pas normal de devoir quémander chaque année des primes. »

D’autres envies, comme celle d’ouvrir une ferme-auberge dans une ancienne bâtisse, ont aussi germé. « Nous y proposerions de la viande, des légumes et du vin », expose Katharina. Dans ce pays autrefois viticole, André a conservé un peu de vigne.

(1) Correspondant à une surface minimum installation (SMI).

(1) Correspondant à une surface minimale d’installation (SMI).

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