Les 11 et 14 février derniers, l’Inrae (1) et le Biocivam de l’Aude ont présenté les résultats de leur projet de recherche participative « Gluten, mythe ou réalité ? ». Ceux-ci remettent en cause certaines idées reçues. Les variétés anciennes de blé, par exemple, ne semblent pas apporter une meilleure digestibilité au pain. Par contre, la mouture sur meule de pierre et l’utilisation de levain améliorent nettement celle-ci.

Retours de consommateurs

« Ce projet est né du questionnement de paysans boulangers ou pastiers. Ces producteurs avaient des retours de consommateurs hypersensibles au gluten qui leur disaient mieux digérer leurs pains ou leurs pâtes. Nous avons alors sollicité l’Inrae de Montpellier (Hérault) pour savoir ce qu’il en était », explique Kristel Moinet, du Biocivam de l’Aude.

Lancé en 2015 et financé par la Fondation de France, le conseil régional d’Occitanie et l’Union européenne, ce projet a mobilisé 15 agriculteurs et 10 chercheurs durant sept ans. Les chercheurs ont d’abord comparé des pains et des pâtes élaborés à la ferme ou par des artisans à d’autres achetés en grande surface et issus d’itinéraires de fabrication industriels. Pour chacun des deux types, ils ont mesuré la facilité d’extraction des protéines issues du réseau de gluten ainsi que la part non digérée in vitro (lire encadré ci-contre). « Les produits paysans contiennent plus de protéines facilement extractibles et ont une meilleure digestibilité in vitro », relève Marie-Françoise Samson, de l’Inrae de Montpellier, qui a réalisé ces analyses.

Des étapes décisives

Afin de comprendre d’où viennent ces différences, les chercheurs ont ensuite comparé les résultats obtenus en fonction des variétés et méthodes employées à chaque étape de transformation.

Pour le pain, c’est l’utilisation de levain, riche en levures et en bactéries lactiques diversifiées, qui améliore le plus la digestibilité, suivie par la mouture du blé sur meule de pierre et la fermentation longue à basse température. De plus, il y a également des différences entre variétés, sans que celles-ci soient liées à leur période de sélection récente ou ancienne.

Pour les pâtes, l’effet variété est plus marqué. « Ce sont les plus riches en protéines qui donnent le plus de protéines facilement extractibles », note Dominique Desclaux, de l’Inrae de Montpellier. La mouture sur meule de pierre et le séchage long à température modérée favorisent également la digestibilité.

Identifier les produits les mieux tolérés

D’autres travaux devraient suivre. Ces premiers résultats vont être mis en accès libre afin qu’ils puissent contribuer à l’élaboration d’un cahier des charges destiné à identifier des produits céréaliers mieux tolérés par les hypersensibles au gluten. « Nous allons également intégrer ces éléments scientifiques dans nos fiches techniques sur la transformation à la ferme, afin d’attirer l’attention des agriculteurs sur les étapes qui influent sur la digestibilité du gluten », ajoute Kristel Moinet.

Frédérique Ehrhard

(1) Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement.