Depuis 2009, le Gaec des Pieds de moutons à Palhers, en Lozère, produit du lait d’hiver, très recherché par les fromageries. « Nous avons commencé par désaisonner nos chèvres avec un protocole lumineux, associé à un traitement hormonal, pour grouper les chaleurs, explique Samuel Solignac. Depuis que nous sommes passés en bio en 2013, nous utilisons toujours le protocole lumineux, et nous jouons sur l’effet bouc pour le groupage. »
L’objectif de Samuel et de son frère Hervé est de programmer la lutte entre mi-mars et mi-avril. Pour y parvenir, ils jouent sur une succession de jours longs, puis de jours courts. Ce protocole lumineux démarre au 20 octobre par trois mois de jours longs. La chèvrerie, qui abrite les femelles et les mâles, est alors éclairée de 6 h à 22 heures. Viennent ensuite deux mois de jours naturellement courts, du 20 janvier au 20 mars.
Effet bouc
Au début de cette période de jours courts, les quarante-cinq boucs sont déplacés dans un autre bâtiment. « Quinze jours avant la lutte, nous introduisons avec eux dix chèvres de réforme, poursuit l’éleveur. Une semaine après, celles-ci sont en chaleur, ce qui finit de réveiller sexuellement les boucs. » Ces derniers rejoignent alors le lot destiné au renouvellement. Ils portent des tabliers marqueurs. « Tout au long de la journée, nous repérons les chèvres marquées et, à 14 heures, le technicien vient réaliser les IA (1). » En une semaine, le lot est inséminé à 85 %. Les boucs assurent également la monte naturelle des chevrettes et des autres chèvres, ainsi que les retours des IAsans succès. Les mises bas s’étalent entre mi-août et mi-septembre. 15 % des chèvres restent vides et font une lactation longue, avant de reprendre le rythme du reste du troupeau.
« Il faut élever davantage de boucs et être à deux durant toute la lutte pour gérer les différents lots. Mais nous obtenons ainsi un pic de lactation entre novembre et février », note Samuel. Cela colle bien à leur calendrier fourrager. « Lorsque les chèvres commencent à pâturer, en mai, elles sont en fin de lactation. Nous les mettons sur des prairies non mécanisables, et nous réservons les autres à la constitution des stocks. L’été, lorsque l’herbe se fait plus rare, les chèvres sont à l’entretien. »
Leur lait est collecté par le groupement Les chèvres bio France. Pour compenser les surcoûts liés au désaisonnement, la grille de prix prévoit, de septembre à janvier, un prix de base de 1 011 euros les 1 000 litres, contre 790 €/1000 l le reste de l’année. « Le lait d’hiver est nécessaire pour développer la filière bio, souligne l’éleveur. Les fromageries que nous approvisionnons ont besoin de travailler du lait frais toute l’année. »
Frédérique Ehrhard
(1) Insémination artificielle.