Cinq ans d’installation rime avec la fin des avantages sociaux et fiscaux mais aussi avec la possible déchéance des aides à l’installation. Un accompagnement s’impose pour maintenir à flot certaines exploitations au-delà de ce cap.
Profils plus sensibles
« Les cinq ans sont souvent observés comme un cap à franchir pour les créations ou reprises d’entreprises quel que soit le secteur d’activité », explique Samia Lay, chargée de mission à la chambre d’agriculture régionale d’Occitanie. Dans cette région, le cap des cinq ans est souvent fatal au maintien de l’activité des plus de 40 ans : entre 20 et 30 % de ces derniers cessent leur activité chaque année à cinq ans, alors que ces profils représentent un tiers des installations annuelles de la région.
En France, en moyenne 11,1 % des installés de plus de 40 ans décident d’arrêter leur activité entre la quatrième et la septième année. Pourtant, ces profils représentent près de 20 % des installations de 2018, selon les données MSA, traitement ODR (Observatoire du développement rural), Inrae.
De nouvelles charges et...
Alexandre, éleveur laitier dans la Sarthe installé en 2011, a vécu la fin de ses engagements en pleine crise laitière. Un contexte déjà compliqué alors que prenait fin l’exonération partielle de ses cotisations sociales. Ce dispositif, mis en œuvre par la MSA, permet aux jeunes de moins de 40 ans de bénéficier d’exonérations sur certaines de leurs cotisations sociales pour leurs cinq premières années. « Ce sont de nouvelles charges qui s’ajoutent qu’on aurait pu anticiper dans mon plan de financement », remarque-t-il.
.…La fin des avantages
Les dispositifs d’abattements fiscaux sur les bénéfices et de dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti prennent également fin après cinq ans d’installation. Banques, assurances, coopératives ou centres de gestion proposent des offres spécifiques qui durent rarement au-delà : par exemple, le Cerfrance Terre d’Allier assure la remise des résultats et l’analyse économique de l’exploitation des nouveaux installés (se situer, se comparer, s’améliorer et anticiper) pendant quatre ans à un tarif préférentiel, en complément d’une analyse technico-économique pointue réalisée par la chambre d’agriculture après trente et quarante-cinq mois d’activité.
La déchéance menace
Si JA affiche un taux de maintien de 99 % sur les cinq premières années pour les jeunes entrés dans le parcours à l’installation aidée, le cap des cinq ans peut signifier le remboursement des aides à l’installation. Le jeune peut être soumis à une déchéance partielle ou totale de ses aides en cas de non-respect d’un des engagements pris à l’installation. Selon le ministère de l’Agriculture, 571 dossiers contrôlés ont abouti au remboursement partiel ou total des aides en 2019. Mais 88% des agriculteurs ayant saisi l’ASP ont pu bénéficier d’une remise (partielle ou totale), compte tenu de leur situation financière.
Pour éviter ces situations et accompagner tous les nouveaux installés, les Jeunes Agriculteurs des Bouches-du-Rhône proposent un dispositif de suivi jusqu’à six ans (lire l’encadré ci-contre). Celui-ci est « préconisé très fortement aux nouveaux installés, précise Thomas Chaullier, président des JA Bouches-du- Rhône. Nous militons au sein de notre structure pour que cela devienne obligatoire. »
Retour à la réalité
Au-delà des échéances de fin de cinquième année, d’autres problématiques apparaissent, plus personnelles. « Au bout de cinq ans, c’est l’essoufflement, la réalité prend le pas », explique Marie-Pierre Auvray, formatrice pour l’Association pour le développement de l’emploi agricole et rural (ADEAR) d’Indre-et-Loire. Durant la formation « Passer le cap des premières années d’installation » qu’elle anime (lire l’encadré ci-dessus), il n’est pas rare d’y entendre relater la vie de couple ou la vie de famille. Des sujets rarement évoqués, ni pendant le parcours à l’installation, ni après.