« Assureur, t’assures pas », la banderole placée ce 16 décembre 2023 à l’entrée du rond-point de Bourg-Madame, dans les Pyrénées-Orientales, résume bien le problème auquel sont confrontés les éleveurs de montagne, en Cerdagne, mais aussi dans le Conflent et le Vallespir. « De février à novembre, il n’est tombé que 150 mm de pluie, explique Bruno Marty, éleveur d’aubracs à Sainte-Léocadie. Cet été, le vent et les températures à 40°C ont grillé les prairies. J’ai perdu 80 % de mes récoltes. Mais les assureurs ne veulent pas m’indemniser, car l’indice de pousse de l’herbe sur lequel ils s’appuient, n’indique qu’un léger déficit. »

Cet indice, établi à partir d’images satellitaires, donne visiblement des résultats très éloignés de la réalité. « Des agents de la chambre d’agriculture sont venus expertiser les pertes en céréales, qui se situent entre 80 et 90 %. Nous n’avons même pas moissonné ! Il est difficile d’imaginer que les prairies juste à côté, soumises aux mêmes conditions climatiques, aient pu produire à peu près normalement », relève Christian Tallant, éleveur d’aubracs et de brebis à Osséja.

Un territoire mobilisé

« En Cerdagne, la moitié des éleveurs sont assurés. Ils ont joué le jeu, aux assureurs et à l’État de le jouer à leur tour. Nous ne demandons pas la charité, mais juste d’être indemnisés », souligne Bruno Vila, président de la FDSEA, qui a appelé à manifester aux côtés de JA (Jeunes Agriculteurs). Faute de trésorerie, la plupart n’ont acheté qu’une partie des fourrages nécessaires pour compenser les pertes et passer l’hiver.

« Nous avons besoin d’une réponse rapide pour décider si nous devons vendre ou pas une partie de notre cheptel, affirme Christian Tallant. Le ministère de l’Agriculture nous dit qu’il va améliorer l’indice pour 2024, c’est bien. Mais nous ne voulons pas être les sacrifiés de 2023. »

Au-delà de ces problèmes d’assurance, la sécheresse se poursuit. Ceux qui ont pu irriguer quelques parcelles ont réduit les pertes. « Nous avons besoin d’améliorer les réserves en eau pour sécuriser plus de surfaces, insiste Fabienne Bonnet, présidente de la chambre d’agriculture. Des projets en cours se heurtent à des recours. L’État doit nous aider à les débloquer avant qu’il ne soit trop tard. Quel serait l’avenir de ce territoire sans éleveurs ? »