Un seul coup de langue au stade « trois feuilles » des graminées, c’est l’un des principes de base du pâturage tournant dynamique (PTD), en test depuis deux ans chez une centaine d’éleveurs de bovins et ovins de la coopérative la Caveb (1). Si l’animal doit redonner un deuxième coup, il emporte la gaine de la plante, et avec elle une partie du potentiel de repousse.
« La technique vient de Nouvelle-Zélande, où des éleveurs ont repris la méthode décrite par André Voisin dans son ouvrage sur la « Productivité de l’herbe » (2) il y a de nombreuses années, indique Joséphine Cliquet, animatrice du programme. Nous l’avons adaptée. Nous ne prenons pas en compte les hauteurs d’herbe ou la méthode des sommes de températures, qui sont trop imprécises. Pour une même hauteur d’herbe de 15 cm par exemple, la quantité d’herbe varie de 1 à 3 t de matière sèche par ha (t de MS/ha) en fonction de la densité. »
Au stade trois feuilles, la qualité de la plante est optimale. « Lorsque la troisième feuille ou limbe a terminé sa croissance, la première amorce sa phase de flétrissement, indique Joséphine Cliquet. L’épi monte dans la gaine et le couvert perd de sa valeur alimentaire. » Mieux vaut donc consommer l’herbe avant.
Intervention d’un expert
En pratique, la mise en place de la méthode nécessite l’intervention d’un technicien, dont le coût de la prestation est pris en charge dans le cadre du programme Life+PTD. « Il évalue le potentiel des parcelles », explique Joséphine Cliquet. Là est tout l’enjeu. Les animaux doivent avoir de quoi couvrir leurs besoins pendant trois jours au maximum. En fonction du troupeau et des prairies, l’expert propose un redécoupage du parcellaire, sachant que dans un premier temps, il est conseillé de tester le PTD avec un lot sur une partie de son exploitation.
Selon les cas, le temps de séjour sur une même parcelle varie d’un à trois jours. Jamais plus, sinon les animaux reviennent sur leurs pas, attirés par les repousses bien plus appétentes. « Celles-ci constituent une réserve précieuse pour l’évolution de la plante », insiste Joséphine Cliquet. Si elles sont entamées, la graminée retardera la formation de la première feuille et elle aura moins de sucres à consacrer à la constitution des racines. Or, ces dernières jouent un rôle fondamental pour résister à la sécheresse, en particulier. »
Anticiper
La mise en place de la technique passe par l’observation du nombre de feuilles des graminées. « A une feuille, par exemple, on sait que l’on est à mi-parcours en temps pour atteindre le stade trois feuilles, précise Joséphine. S’il a fallu dix jours pour atteindre ce stade depuis la sortie des animaux, on sait qu’il en faudra seulement dix de plus pour atteindre les trois feuilles. » En effet, au début, la plante puise dans ses réserves pour former la première feuille. Dès que celle-ci est fonctionnelle, la photosynthèse accélère la croissance des deux feuilles suivantes. » Le temps de repos varie donc selon les saisons et la pousse de l’herbe. L’organisation au printemps doit toutefois s’anticiper. « Il faut sortir les animaux le plus tôt possible, même avant les trois feuilles pour que les différents paddocks ne soient pas tous au même stade en même temps », souligne Joséphine Cliquet. Le lâcher des animaux prend en compte la portance des sols mais il se fait le plus souvent avec des lots d’animaux plus petits ou avec des génisses, par exemple.
« La conduite à l’automne est encore plus stratégique qu’au printemps, ajoute l’animatrice. Les erreurs de gestions sont plus préjudiciables à cette saison. C’est le moment où l’on peut faire pâturer après les trois feuilles sans perdre en qualité et où on peut gagner de la hauteur de gaine. »
La méthode offre donc aux animaux une herbe de qualité supérieure, tout en stimulant la repousse dans le but de réduire les charges. Et cela sans dégrader ses performances de production. Le bilan carbone est lui aussi amélioré grâce à un usage limité du tracteur et des apports en engrais réduit.
(1) Disponible aux Editions France agricole : www.lagalerieverte.com
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Sommaire
Herbe : Le pâturage dynamique pour doper la pousse
- Herbe : Le pâturage dynamique pour doper la pousse
- 1. Quinze ans d’expérience en ovins : 1. Quinze ans d’expérience en ovins
- 3. Le duel dynamique/tournant en chiffre : 3. Le duel dynamique/tournant en chiffres
- 2. Objectif : pâturer au stade des trois : 2. Objectif : pâturer au stade des trois feuilles de la graminée