« Nous sommes soulagés mais nous restons concentrés sur l’objectif : ne pas permettre la réintroduction de l’ours », explique Julien Lassalle, qui élève 500 brebis basco-béarnaises dans la vallée d’Aspe. Malgré un intense travail de concertation sur le terrain, la signature par Nicolas Hulot du plan ours 2018-2028 a déclenché l’hostilité des éleveurs d’ovins des Pyrénées-Atlantiques, encore échaudés par l’exemple de l’Ariège où la saison d’estive a connu un nombre d’attaques record.
« Nous ne voulons pas d’autre Monsieur Ours »
Les éleveurs restent mobilisés, prévient Julien Lassalle : « Attention ! Le gouvernement Macron va nous dépêcher quelqu’un d’autre, nous restons concentrés sur l’objectif. Demain, on avait prévu une mobilisation à Etsaut », là où la rumeur annonçait la venue de Nicolas Hulot. « Nous maintenons le rassemblement pour dire au gouvernement que nous ne voulons pas d’autre Monsieur Ours. Nous sommes déterminés. Nous serons là, bergers, élus, et tous ceux concernés par cette réintroduction. »
« Quelque part, c’est un soulagement pour les éleveurs, résume Francis Poineau depuis son estive de Larrau, dans le Pays basque. Ce n’est pas forcément la priorité la réintroduction de l’ours. Il existe des ours dans les Pyrénées. En même temps, cette démission, c’est dommage pour l’enjeu global de la transition écologique. C’est un monsieur qui avait des convictions avec la transition écologique et autres, le nucléaire… Mais, c’est un soulagement. »
Aidé de la jeune Jessica Thomas, Francis Poineau conduit son troupeau de brebis laitières en estive de la mi-mai à octobre. « Vivre sous la pression d’un prédateur comme l’ours, c’est dur. Il y a un savoir-faire historique en Béarn, les bergers savent monter la garde, mais ce sont des contraintes supplémentaires… Et puis l’inquiétude, ce stress à gérer quand on a des attaques. C’est déjà assez compliqué comme cela d’être berger. »
Inquiétudes à tous les niveaux
« À l’arrivée d’un nouveau ministre au gouvernement, il nous faudra, en Béarn notamment, être particulièrement vigilants, unis, alors que l’administration du ministère de l’Environnement demeurera la même, c’est-à-dire nocive », met aussi en garde le député David Habib (PS).
Les partisans de la réintroduction de l’ours sont également inquiets, comme Jean-Claude Coustet, ancien maire de Borce, dans la vallée d’Aspe : « Est-ce que le cabinet du ministre va tenir les engagements d’Hulot ? On savait que si la réintroduction ne se faisait pas avec lui, elle ne se ferait jamais », dit-il.
Jean-François Blanco (EELV), conseiller régional favorable à l’ours, se veut plus optimiste : la démission du ministre, pense-t-il, « ne modifiera pas l’engagement sur l’ours de la part du gouvernement. D’abord, il y a des engagements internationaux qui lient la France. C’est maintenant la responsabilité du chef de l’État. Ce geste de réintroduction, c’était un acte minimal, une réparation par rapport à 2004 où l’ourse Cannelle a été tuée par un chasseur lors d’une battue autorisée par l’Administration ».
Un message au futur ministre mercredi
Les bergers ont compris la leçon et veulent convaincre : « Nous avons perdu la bataille médiatique, il y a eu une médiatisation énorme sur l’indispensable biodiversité. Un conditionnement de la population. Nous sommes terriblement déterminés. Nous restons concentrés sur notre territoire, la réintroduction de l’ours n’en fait pas partie », insiste Julien Lassalle. En attendant d’envoyer mercredi à Etsaut un message au futur ministre.