Les prix du blé et de l’orge chutent nettement cette semaine, poussés par les pluies et la baisse des températures aux USA et donc par la chute des prix mondiaux du maïs. Cela ne doit pas occulter une demande dynamique en blé et de graves problèmes en vue sur l’offre de blé de haute qualité en Amérique du Nord. Les prix des oléagineux régressent aussi après l’envolée de la semaine dernière.
Les blés français poursuivent leur baisse
Les prix des blés français ont perdu du terrain cette semaine dans la foulée des autres origines mondiales mais surtout des blés de la mer Noire.
Le blé rendu Rouen abandonne ainsi presque 10 €/t à 200 €/t en base juillet et la cotation la plus rapprochée d’Euronext (septembre) se retrouve en milieu d’après-midi ce vendredi à 198,5 €/t, inférieure de plus de 6 €/t à son niveau de clôture de vendredi dernier. Les prix sont donc redescendus sous le niveau des 200 €/t sur le Matif, poussés par la chute des prix de la mer Noire (–7 $/t pour les blés russes, à 237 $/t Fob, et –15 $/t pour les blés ukrainiens, à 224 $/t Fob).
La récolte est retardée par les pluies dans l’ouest de l’Union européenne (UE) mais elle a bien débuté dans le sud de la Russie et dans la zone de la mer Noire avec des résultats qui sont très bons. On attend notamment un très fort rebond en Roumaine (avec une hausse de la récolte de plus de 3 millions de tonnes par rapport à l’an dernier) ainsi qu’en Bulgarie (+1,6 million de tonnes) après les résultats décevants de l’an passé. En France, la récolte est retardée par les pluies qui suscitent des interrogations en termes de qualité mais les perspectives de rendements restent élevées avec une progression possible de près de 9 millions de tonnes par rapport à 2020. Cette situation pèse sur les prix dans un contexte où le maïs a affiché une détente cette semaine sur le marché mondial avec la nette amélioration des conditions hydriques dans le Midwest américain.
Une activité mondiale dynamique en blé
Malgré leur baisse, les blés français demeurent plus chers actuellement que leurs concurrents, que ce soient les blés baltes ou les blés du sud-est de l’UE. Ils sont plus chers aussi que les blés russes et le dernier achat de l’Égypte en atteste : ce pays a de nouveau acheté du blé cette semaine, 240 000 tonnes au total, dont 180 000 tonnes de blé roumain et 60 000 tonnes de blé russe. Les achats et les appels d’offres restent dynamiques sur le marché mondial du blé tendre : l’Iran vient d’acheter 130 000 tonnes, l’Algérie recherche actuellement 30 000 tonnes et l’Arabie vient de lancer un appel d’offres pour 360 000 tonnes. Le Pakistan est aussi en train de rechercher de grosses quantités de blé pour achat sur le premier trimestre de la campagne.
Cette bonne activité et la situation nord-américaine restent quand même des facteurs de soutien : la situation très sèche dans le nord des USA et au Canada nous a conduits à revoir à la baisse les productions de blé de ces deux pays et cela vient tendre considérablement les bilans des blés de haute qualité et du blé dur.
Maïs : nette baisse des prix mondiaux
Le maïs fait le yoyo à Chicago et perd presque 10 % de sa valeur cette semaine. Cela découle de l’amélioration des conditions climatiques (retour de l’humidité et baisse des températures pour les prochains jours) dans le nord-ouest de la Corn-belt. L’impact de cette amélioration a déclenché de gros mouvements de revente de la part d’opérateurs qui avaient gonflé leurs achats auparavant à cause des inquiétudes climatiques.
Parallèlement, les nouvelles provenant du Brésil indiquent des résultats très légèrement meilleurs que prévu pour les premiers rendements de la seconde récolte. Le maïs US a perdu en conséquence presque 30 $/t cette semaine et le maïs brésilien, 12 $/t. En Ukraine, les prix de l’ancienne campagne n’ont guère évolué mais ceux de la nouvelle campagne viennent d’abandonner 20 $/t en deux jours. La compétition entre les maïs français et les maïs ukrainiens est à surveiller de près : avec la chute récente de leur prix, les maïs ukrainiens se rapprochent maintenant des maïs français à destination de la péninsule Ibérique pour les échéances de la nouvelle récolte.
Ces évolutions ont poussé en légère baisse les maïs français sur la façade atlantique qui ont perdu 5 €/t cette semaine (à 245 €/t Fob Bordeaux en base juillet pour la récolte de 2020). Les cotations sont en revanche restées stables Fob Rhin (260 €/t et 206 €/t respectivement en base juillet pour l’ancienne et la nouvelle récolte).
La forte volatilité mondiale ne doit pas cacher le fait que le bilan de maïs mondial reste tendu sur la fin de la campagne ; il se détendra en 2021-2022 mais les stocks ne remonteront que très modérément. Une incertitude de taille monte toutefois actuellement : elle provient de la Chine où les développements de la grippe aviaire sont plus sérieux qu’attendu.
L’orge est obligée de suivre à la baisse
Comme le blé, les orges fourragères ont perdu du terrain cette semaine : leur prix rendu Rouen a chuté de 9 €/t, à 196 €/t, ce qui représente un niveau de 237 $/t Fob Rouen. L’avancée de la récolte en France et dans l’UE contribue probablement à l’affaissement des prix mais ceux-ci ont été influencés aussi par l’environnement mondial. La Chine semble décaler ses achats et cela pèse nettement sur les prix de la mer Noire (–15 $/t pour les orges ukrainiennes cette semaine) et donc également sur les orges françaises. Les orges fourragères subissent par ailleurs l’effet de la détente des prix des maïs US et ukrainiens et de ceux du blé.
Toujours peu de changement en revanche sur le créneau brassicole.
Le retour des pluies au Canada et le début de la récolte UE ont fait pression sur le colza
Les prix du colza ont connu de fortes variations compte tenu des incertitudes au Canada. La vague de chaleur en Amérique du Nord a fait craindre une dégradation du potentiel de rendement du canola, ce qui a soutenu les cours durant la semaine dernière. Le retour des précipitations en début de semaine a toutefois apporté un peu de répit, ce qui a permis aux cours de nettement dégonfler. Cette baisse a été exacerbée par le léger recul de l’or noir qui a pâti de l’échec des négociations entre les membres de l’Opep.
Le déficit hydrique persistant dans certaines plaines canadiennes et les inquiétudes qu’il suscite a néanmoins engendré un rebond des prix à la fin de la semaine. Cette hausse s’est toutefois avérée insuffisante pour compenser le mouvement de baisse du début de semaine. Ainsi, les prix canadiens pour l’échéance de novembre ont cédé 18 $/t en une semaine (à 647 $/t). Malgré le rebond de production attendu au Canada en 2021, le bilan s’annonce fragile compte tenu de la forte demande à l’exportation prévue vers l’UE. Les cotations françaises, également lestées par le démarrage de la récolte, ont suivi la tendance nord-américaine : les prix rendu Rouen et Fob Moselle accusent, respectivement, des pertes de 19 €/t (à 525 €/t) et 18 €/t (à 526 €/t) sur le rapproché.
Les prix du soja se sont également un peu dégonflés
Le retour des pluies sur le Midwest américain a rassuré les opérateurs et fait baisser les prix du soja au début de la semaine, et cela malgré la publication mardi d’une notation des cultures US inférieure à celle de la semaine antérieure (59 % de surfaces bonnes à excellentes, en baisse de 1 % par rapport à la semaine dernière) et toujours bien en deçà de la moyenne décennale. Les prix sont tout de même repartis en légère hausse à partir du milieu de la semaine dans le sillage du canola et du pétrole. En moyenne, le cours du soja s’est déprécié de 21 $/t sur la semaine à Chicago (511 $/t).
Les conditions météorologiques en juillet et août seront déterminantes pour la constitution du rendement des fèves. Bien que les modèles météorologiques prévoient dans l’ensemble des températures et précipitations proches de la normale en juillet, certains états du nord-ouest de la Corn-belt souffrent de déficit hydrique des sols. Les deux Dakotas ainsi qu’une partie du Minnesota et de l’Iowa sont les zones parmi les plus affectées, ce qui se reflète dans les dernières notations de culture très décevantes. La situation est au contraire plutôt prometteuse partout ailleurs. D’autre part, les opérateurs chinois ont accumulé d’importants stocks de soja, le ralentissement de la trituration n’ayant pas permis d’absorber tous les arrivages brésiliens.
Néanmoins, les achats chinois pour de la nouvelle récolte US s’avèrent très dynamiques pour ce stade de la campagne, selon les déclarations de ventes publiées par l’USDA. Cela reflète le fort dynamisme attendu des besoins animaux au cours de la campagne de 2021-2022. Cependant, tous les regards se portent à nouveau sur les risques sanitaires en Chine en raison de la multiplication de foyers de peste porcine africaine depuis juin, plus particulièrement dans le sud-ouest du Sichuan. Les ventes paniques des éleveurs durant le printemps ont contribué à faire pression sur les prix chinois de la viande de porc. Ces derniers se sont effondrés depuis le début de l’année 2021 pour renouer avec leurs niveaux les plus bas depuis 2019 (avant-crise de la peste porcine).
Les cours du tourteau de soja ont baissé aussi, sauf en Argentine
Les prix du tourteau de soja à Chicago ont évolué à la baisse dans le sillage de la fève et perdent 29 $/t sur la semaine (à 392 $/t). Les tourteaux se sont également dépréciés de 12 €/t en France (à 410 €/t à Saint-Nazaire). En revanche, les bas niveaux du fleuve Paraná et les difficultés logistiques qu’ils engendrent, combinés à des mouvements de grèves du personnel portuaire en Argentine, ont permis aux cours du tourteau de soja argentin de s’apprécier légèrement sur la semaine (+1 $/t, à 410,5 $/t).
Sur le marché français, le pois a suivi les tourteaux à la baisse ; départ Marne, il a cédé 8 €/t (à 245 €/t).
Le tournesol évolue à contre-courant et s’apprécie grâce à l’huile
Le tournesol s’est apprécié cette semaine, particulièrement dans la zone de la mer Noire où les prix ont bénéficié du rebond de l’huile. Cette dernière — qui s’avérait très compétitive face aux huiles concurrentes — a en effet regagné de l’intérêt auprès des acheteurs. Les prix Fob nouvelle récolte de la graine de tournesol ukrainienne ont ainsi progressé de 10 $/t sur la semaine (à 482,5 $/t). Les cotations françaises ont suivi : le tournesol à Saint-Nazaire pour la nouvelle récolte gagne 5 €/t sur la semaine, aussi bien en qualité standard (à 470 €/t) qu’en qualité oléique (à 480 €/t).
À suivre : récoltes de blé, d’orge et de colza dans l’UE et dans la zone de la mer Noire, climat dans le nord des USA et au Canada, développement du maïs en Ukraine, UE et USA, prix du pétrole, demande et production mondiale d’huile végétale.