Sur son exploitation située à Blain, dans la Loire-Atlantique, au nord de Nantes, David Guy teste depuis 2016 l’association de l’agriculture de conservation des sols et de l’agriculture biologique. « J’ai mis en place le non-labour dès mon installation en 2003, pour des raisons essentiellement économiques, puis intégré les couverts et le semis direct, notamment pour gérer le ray-grass résistant, explique-t-il. Je me suis ensuite converti au bio, pour répondre au marché – il y a une part importante d’éleveurs bio dans l’Ouest –, à la pression sociétale, et pour le défi technique que la combinaison de ces deux modes de production représente. »
Limiter les apports d’engrais
À ce jour, seules les cultures suivant un chanvre ou un sarrasin sont semées en direct, car il s’agit de la seule situation exempte d’adventices concurrentielles après récolte. Dans les autres cas culturaux, y compris pour détruire les couverts (avec un broyage et mulchage), un travail minimal du sol est nécessaire, sur 3-5 cm. « Aujourd’hui, le semis direct en bio sur la totalité de l’exploitation n’est pas tenable, à moins de trouver un jour un produit bio équivalent au glyphosate, souligne l’agriculteur. Semer en direct ne signifie pas pour autant ne rien faire : l’implantation des cultures doit être particulièrement soignée. »
Grâce aux cultures de printemps, David Guy implante des couverts longs, qui apportent plus de biomasse au sol : 4 à 5 tonnes de matière sèche par hectare. « Les couverts sont un élément clé pour la fertilité de mon système, car je limite volontairement les apports d’engrais organiques extérieurs [fientes de volailles séchées sur les couverts et engrais localisé au semis des cultures, NDLR], par crainte d’un manque de disponibilité de ces produits à l’avenir. » L’expérimentation d’un couvert annuel de trèfle blanc, semé dans la culture précédente ou suivante, a elle aussi pour objectif de maintenir la fertilité sur l’exploitation. De plus, ce couvert permet un nettoyage de la parcelle, moyennant une bonne qualité d’implantation. Quant au trèfle violet, les résultats sont plus mitigés, car son système racinaire ne permet pas un effet aussi couvrant que pour le trèfle blanc. D’un point de vue économique, « il serait intéressant d’évaluer la rentabilité de ces années blanches, en comparaison d’achats d’engrais », souligne David Guy.
S’agissant de la gestion phytosanitaire, elle se révèle pour lui plus secondaire : « En bio, nous avons quand même des solutions, alors qu’avec la fertilité, il n’y a pas d’alternatives. » Dans ce domaine, l’agriculteur prévoit de tester certains produits de stimulation des plantes cet automne et réfléchit également aux préparations naturelles.
Un essai en bandes
Toujours dans cet objectif de maintien de la fertilité, David Guy conduit depuis trois ans une parcelle de 15 hectares en bandes de 12 mètres, afin d’y faire alterner des cultures d’hiver et de printemps. « L’idée m’est venue après plusieurs étés secs, où nous avions pendant plusieurs semaines des sols quasi nus à cause des couverts non levés, raconte l’agriculteur. Avec ces bandes, mon objectif est d’avoir toujours du vert à moins de 6 mètres dans la parcelle, ce qui favorise aussi la biodiversité fonctionnelle. »
Cette année (voir la photo ci-dessus), il est prévu de l’avoine après du chanvre sur les bandes d’hiver, et du sarrasin pour celles de printemps après un triticale et un couvert d’été. Les résultats de cette première expérimentation ne seront visibles que d’ici à quelques années.
Charlotte Salmon