Peut-on valoriser des lots contaminés par du datura dans un méthaniseur et épandre le digestat qui en est issu sans risquer de diffuser des graines encore viables ? Les alcaloïdes produits par le datura affectent-ils la production de biogaz ? C’est ce à quoi a cherché à répondre Arvalis avec le projet Meta Datura qu’il pilote depuis trois ans en Nouvelle-Aquitaine, et qui prendra fin à la mi-2025.
Les premiers résultats, issus d’essais en laboratoire, sont prometteurs : les graines de datura étaient mortes après une exposition de 10 jours à un pouvoir méthanogène dans un microréacteur d’un litre. Même conclusion dans un réacteur de 20 litres, qui permet l’assemblage de différents intrants (graines de datura, fourrages, lisiers, etc.) et se rapproche donc un peu plus de la réalité. Le délai était toutefois plus important : après 11 jours, près de 87 % de graines mortes et 13 % de graines « fraîches » (non mortes mais sans faculté germinative), puis 100 % de graines mortes à 40 jours.
Un délai inférieur au temps de séjour moyen des rations dans les méthaniseurs (60 jours), « même si on ne peut garantir que la totalité des graines y restent aussi longtemps », signale Manuel Heredia, d’Arvalis. Bonne nouvelle aussi pour la production de biogaz, qui ne semble pas affectée par la présence de datura dans la ration.
Essais à grande échelle
Ces résultats doivent être confortés par des essais à plus grande échelle, sur une unité de méthanisation expérimentale de l’institut technique de 150 m³. Celle-ci permettra la production d’une quantité suffisante de digestat pour être épandue. La présence d’alcaloïdes dans le digestat est aussi surveillée. « En laboratoire, on en a trouvé au bout de quelques jours avant qu’ils ne disparaissent, rapporte Manuel Heredia. Ça n’a pas été travaillé de manière approfondie dans le cadre du projet mais nous publierons des recommandations si les digestats sont susceptibles d’en contenir. »
Dans le cadre du projet ont aussi été évalués les effets, sur la gestion du datura, de l’évolution de la rotation liée à l’introduction de cultures intermédiaires destinées à la méthanisation. « On constate souvent, sur les exploitations qui rentrent dans des projets méthanisation, qu’elles se sortent de certaines problématiques agronomiques en faisant évoluer leur système », explique l’ingénieur d’Arvalis. Mais ici, les effets qui ont pu être observés sur le datura avec l’introduction d’une culture intermédiaire entre deux cultures d’été sont restés modestes, avec une variabilité interannuelle forte. Il faudra donc plus de temps pour émettre d’éventuelles conclusions.