« Nous allons tous mettre la clé sous la porte, si la situation ne s’arrange pas rapidement. Cinq années consécutives de pullulation de rats taupiers, c’est du jamais vu ! Ils ont ravagé nos prairies : une première coupe réalisée à la fin de juin ou au début de juillet m’a permis de récolter seulement 248 ballots sur les 750 à 800 rentrés en année normale », explique Jean-Luc Caillon, qui élève 60 mères salers à Vernols (Cantal).
Les 87 hectares de prairies de l’exploitation sont tous impactés par l’invasion persistante de campagnols que l’éleveur a pourtant combattus par empoisonnement au Ratron GW et par piégeage depuis l’automne dernier.
« La dégradation des prairies, accentuée par les conditions actuelles de sécheresse et de forte chaleur, est telle que je suis à la veille d’une rupture de pâturage au 15 juillet. C’est très inquiétant et nous nous sentons isolés dans ce problème d’envergure et jusqu’à présent sans solution. Je viens d’acheter pour 10 000 € de foin. Je vais vendre des vaches cet automne. Cette situation est démotivante. »
Mauvaise qualité
Pour un éleveur du même canton, ce sont 119 ballots de 400 kg récoltés en 2022 (contre 520 en 2020) alors que ses besoins sont de 300 t de fourrages pour nourrir 100 vaches laitières durant 200 jours d’hivernage en zone de montagne. Pour un autre, 600 ballots au lieu de 2 000. À ce déficit de récolte évalué entre 60 et 70 % sur plusieurs cantons du Cantal, en particulier ceux situés à plus de 900 m d’altitude, se rajoute un manque de qualité des fourrages récoltés. Un ballot de 300 kg peut compter 70 kg de terre ! Un fléau pour la panse des vaches et pour les risques sanitaires encourus, en particulier sur les exploitations fromagères.
Les interprofessions de l’AOP Cantal et de l’AOP Saint-Nectaire ont engagé une réflexion au sujet de demandes éventuelles de dérogations à l’Inao pour que les éleveurs puissent faire consommer aux vaches du foin acheté en dehors des zones géographiques des AOP. Les saisons à venir s’annoncent difficiles avec une hausse de 30 % du prix du foin par rapport à l’an passé.