L’intervention qui a débuté à 06h00, loin du regard des journalistes tenus à l’écart, s’est concentrée sur les abords de la route D281, l’ex-route « des chicanes ». Au milieu de la matinée, des engins de chantier sont arrivés sur la D281. Le mirador et le chapiteau du « Lama fâché », un lieu de vie de la Zad situé au bord de la départementale, ont été détruits par deux pelleteuses.

Un peu plus tard, c’est le squat des « 100 noms » dont les résidents ont été expulsés, qui était visé par les gendarmes. Ils ont dû déloger au milieu de la journée plusieurs dizaines de zadistes venus s’opposer pacifiquement à la destruction du lieu, notamment en grimpant sur le toit.

Des huissiers sur place

Dix squats ont été démantelés et six personnes se trouvant sur un squat « ont été expulsées », les autres étant vides, a indiqué lors d’une conférence de presse Nicole Klein, préfète des Pays de la Loire. Selon elle, l’objectif de démanteler une « quarantaine de squats » sur 97 est « presque atteint » et l’opération est « parfaitement dans les règles ». Neuf huissiers sont sur place, a-t-elle précisé.

« L’objectif a toujours été de faire des expulsions avec discernement, les lieux sont choisis », a-t-elle toutefois précisé, ajoutant que les « gens qui ont montré la volonté d’être dans un projet ne sont pas ceux qui seront expulsés ». Le dispositif choisi « vise à empêcher toute réinstallation dans la durée », a souligné le général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale, lors de la conférence.

Des tracteurs au secours des zadistes

Une dizaine de tracteurs « vigilants » barraient la route, ainsi que des meules de foin et des poteaux électriques. Les gendarmes ont répondu à des jets de projectiles et de cocktails Molotov par des tirs de grenades lacrymogènes et de grenades assourdissantes. Une interpellation a eu lieu pour violences sur agent de la force publique, selon le ministère de l’Intérieur. Un gendarme a été blessé légèrement à l’œil après un tir de projectile.

« On appelle au calme et à l’apaisement. […] On ne peut pas faire autrement, avec la posture radicale du gouvernement et avec la posture radicale de certains habitants de la Zad », a déclaré pour sa part Julien Durand, porte-parole de l’Acipa, association historique des opposants à l’aéroport.

La Confédération paysanne appelle à la concertation

De son côté, la Confédération paysanne a appelé le gouvernement a stoppé les expulsions pour permettre à la concertation de progresser. « Nous considérons que l’usage de la force en direction des lieux de vie de la Zad est dangereux et inapproprié. Le temps a montré que seul un dialogue apaisé peut permettre d’avancer dans ce dossier », écrit le syndicat dans un communiqué du 9 avril.

« Ces expulsions sont illégales », a déclaré une occupante de la ZAD se faisant appeler comme tous les zadistes « Camille ». « C’est inacceptable que l’État chasse les gens de chez eux. On appelle tous les gens à résister, nous soutenir et rejoindre les rassemblements locaux ». « On est pris par une émotion et une colère assez profonde face à ce gâchis », a commenté un autre zadiste face à la presse.

Peu de projets agricoles individuels déclarés

L’opération de grande ampleur lancée lundi matin prévoit d’expulser toute personne n’ayant pas régularisé sa situation en déclarant de nouveaux projets agricoles individuels. La quasi-totalité des 250 zadistes estimés sur place ne l’ont pas fait, préférant une gestion collective du territoire et la possibilité de mener des projets non agricoles.

« Nous devons absolument soutenir nos camarades expulsés manu militari et sauver les projets qui se développent sur la Zad que nous continuerons de soutenir coûte que coûte », a déclaré pour sa part Dominique Le Lay, de l’Acipa.

Le 17 janvier, en mettant fin au projet d’aéroport, le Premier ministre Édouard Philippe avait promis d’éradiquer la « zone de non-droit ». L’opération démarrée lundi est la première d’ampleur depuis l’« opération César » à l’automne 2012, une tentative d’évacuation massive qui avait viré au fiasco malgré la mobilisation de plus d’un millier de gendarmes et policiers.

Avec l’AFP