Afin de comparer les performances des deux technologies, nous avons décidé d'organiser un combat en trois rounds entre deux machines Claas Tucano, la 450 à secoueurs et la 470 hybride.
L'intérêt de tester deux machines Claas est de supprimer les différences liées à la marque et à la technologie employée.
Dans la gamme du constructeur allemand, les deux machines se suivent avec 299 ch de puissance nominale chacune et un boost de 27 ch pour la Tucano 470, ce qui porte sa puissance maximale à 326 ch.
Les essais ont été organisés par notre confrère allemand Top Agrar, à Wolfenbüttel dans le centre de l'Allemagne.
A elles deux, les Tucano ont récolté 100 ha d'escourgeons et 400 ha de blé d'hiver.
L'évaluation des performances porte sur trois critères : le débit de chantier, la consommation de carburant et la qualité de la paille.
Les technologies
Les deux Tucano bénéficient du même système de battage typique de Claas avec un rotor d'accélération de flux APS.
Du côté du moteur, les deux machines sont dotées d'un bloc Mercedes conforme à la norme Tier 4 interim avec technologie de dépollution SCR.
Le protocole
Pour la mesure du débit, nous avons divisé les champs en miniparcelles de 0,1 ha, soit 133,30 m de longueur pour une largeur de coupe de 7,50 m.
Les orges comme les blés étaient homogènes avec de faibles écarts de rendement au sein de la parcelle.
Nous avons réalisé des prélèvements réguliers lors des tests afin de nous assurer que les chaumes avaient bien la même taille.
Les chauffeurs des moissonneuses-batteuses étaient ceux de l'ETA qui accueillait l'essai avec des salariés rompus à la conduite des Claas. Leur consigne était d'utiliser leur Tucano au maximum de ses capacités.
Seule exigence : le niveau de perte ne devait pas dépasser 1 %.
Pour s'assurer de la bonne adéquation des mesures, les techniciens de Claas ont recalibré tous les moniteurs et contrôlé le bon fonctionnement des capteurs avant les tests.
Les pertes étaient également régulièrement contrôlées au champ avec des prélèvements en sortie de hotte.
Le débit de chaque machine a été mesuré de trois façons différentes afin de réduire la marge d'erreur.
Tout d'abord, les deux Tucano étaient équipées d'un capteur de rendement dont les résultats étaient affichés sur le terminal Cebis. Ces résultats ont été compilés et analysés.
La deuxième mesure du rendement s'est effectuée en sortie de vis de vidange avec une remorque Fliegl équipée de six pesons.
Enfin, le pont-bascule de la coopérative a fourni une dernière mesure.
Rendement : avantage hybride
Le premier jour de l'épreuve s'est déroulé dans de l'orge avec des conditions typiques de cet été : un grain mur avec des pailles vertes et un ciel menaçant.
Dans ces conditions, la Tucano conventionnelle à secoueurs a obtenu un rendement de 20,3 t/h, à une humidité de 14,5 %. Les secoueurs ont montré qu'ils réussissaient à être suffisamment agressifs avec les grains résiduels en dépit de la paille verte. Dès que le chauffeur a essayé de rouler un peu plus vite avec cette Tucano 450, les pertes ont augmenté de façon significative et dépassé le seuil de tolérance de 1 %.
De son côté, l'hybride enregistre un débit de grain de 29,6t/h (avec une humidité toujours à 14,5 %) lorsque le rotor tourne à son régime maximal, soit 977 tr/min. L'écart de performance entre les deux technologies est alors de 46 %.
Dans ces conditions humides, la séparation forcée par rotor permet de commencer à travailler plus tôt le matin et de tourner plus longtemps à la tombée de la nuit, ce qui influence aussi la performance globale du chantier.
Avec l'amélioration des conditions entraînant une paille plus sèche et une humidité de grain entre 13 et 13,4 %, l'écart de performance entre les deux systèmes de séparation s'est légèrement réduit.
Le rendement en orge de la Tucano 450 a atteint 24,6 t/h tandis que celui de la version hybride a flirté avec les 33 t/h. L'avantage de la Tucano 470 reste toutefois très net avec un rendement supérieur de 34 %.
La deuxième partie du test de rendement s'est déroulée dans du blé à 10 t/ha. Comme pour l'orge, le ciel était menaçant pendant l'essai et les pailles relativement vertes.
Avec une humidité de grain de 14,9 %, la Tucano à secoueurs a obtenu un rendement de 26 t/h. Pour l'hybride, le débit de chantier est monté à 36,7 t/h, soit 40 % de plus.
Lorsque les conditions de moisson sont devenues plus favorables, les performances dans le blé se sont améliorées pour les deux machines, comme lors de la récolte de l'orge. La Tucano 470 a atteint le rendement maximal de 42,8 t/h. La machine à secoueurs a elle aussi produit sa meilleure performance du test avec un débit de grain de 28,4 t/h, une performance plus qu'honorable.
Néanmoins, le rendement de la Tucano lui est supérieur de 14,4 t/h, soit 50 % de plus par heure. Autrement dit, en une heure, la Tucano hybride récolte jusqu'à 1,5 ha de plus que sa soeur à secoueurs.
Autre avantage du rotor : il maintient son efficacité plus longtemps lorsque la pente augmente, tandis que le travail des secoueurs est affecté plus rapidement.
Consommation : match nul
Le moteur de la Tucano 470 bénéficie d'une surpuissance qui lui permet de délivrer 27 ch de plus que la Tucano 450. La raison : le rotor a besoin d'un peu plus de puissance d'entraînement que les secoueurs. En outre, en raison de son rendement, l'hybride traite un plus grand flux de récolte.
Son moteur tournant à un régime un peu plus élevé, il requiert logiquement plus de carburant. Néanmoins, lorsque l'on ramène la consommation à la tonne de grain récoltée, l'hybride se trouve au même niveau que la machine à secoueurs.
En position d'andainage dans l'orge le plus sec, la consommation mesurée était de 1,47 l/t pour la Tucano 450 et 1,45 l/t pour la 470. Avec le broyeur, nous avons mesuré une consommation de 1,59 l/t pour la 450 et 1,57 l/t pour la 470.
Dans le blé, la consommation de l'hybride en conditions sèches était la même que celle mesurée dans l'orge. C'est uniquement dans la paille de blé humide que nous avons pu constater un écart de consommation en faveur des secoueurs.
Dans ces conditions, l'hybride a nécessité 6 à 8 % de carburant en plus que la Tucano 450.
Deux méthodes d'évaluation pour la paille
Nous nous sommes ensuite intéressés à la qualité de la paille, puisque c'est souvent le défaut pointé du doigt sur les machines à rotor. Le régime du rotor de la Tucano 470 est variable et cette vitesse a une influence importante sur la préservation de la paille. Nous avons donc décidé de tester trois régimes : 367, 850 et 977 tr/min.
Les régimes le plus bas et le plus élevé sont optionnels sur la Tucano 470. Il est malheureusement nécessaire de changer la configuration des courroies à la main pour passer à 367 ou 977 tr/min.
Pour plus de polyvalence de l'hybride, on aurait aimé bénéficier d'un système de variation continue du régime du rotor.
Une fois le changement de régime maîtrisé, nous avons comparé les quantités de paille produites par l'hybride et la machine à secoueurs. Pour mesurer la quantité de paille utilisable, nous avons procédé de deux façons.
Tout d'abord, nous avons ramassé la paille contenue sur un andain déposé sur une bâche de 10 m de longueur. Nous avons alors comparé le poids et surtout le diamètre des ballots ainsi obtenus.
La seconde méthode, plus classique, consistait à ramasser la paille sur 10 mètres avec une presse à balles rondes. Les miniballes ainsi fabriquées ont été pesées au moyen d'un peson monté sur un chargeur frontal.
Les résultats obtenus avec la première méthode ont été confirmés par la seconde.
Paille : le rotor performant à faible vitesse
En utilisant le régime faible de 367 tr/min, la Tucano hybride a produit 6,77 t de paille par hectare. Cette performance est très proche de celle de la Tucano à secoueurs qui ne produit que 2 ou 3 % de paille en plus avec 6,9 t/ha.
La qualité de la paille et la longueur des brins sont sensiblement équivalentes avec les deux systèmes de séparation. Bien entendu, si le régime 367 tr/min est le plus intéressant pour préserver la paille, c'est aussi celui qui offre le plus faible débit de grain. Néanmoins, ce dernier reste supérieur à celui de la Tucano 450 d'environ 1 t/h.
Au régime de 850 tr/min, l'augmentation du débit de chantier est très nette avec une hausse de 30 % par rapport à la petite vitesse.
De son côté, la quantité de paille récoltée diminue de 6 à 8 % avec 6,4 t/ha en moyenne. La paille porte les marques du traitement plus intensif du rotor, mais sa structure reste encore très correcte et suffisamment préservée.
Le dernier régime (977 tr/min) transforme la 470 en bête de récolte avec un débit 50 % supérieur à celui de la Tucano conventionnelle. Mais pour obtenir ce débit, la paille est fortement comprimée par le rotor.
Avec 4,6 t/ha, il y a un tiers de paille utilisable en moins qu'avec la Tucano 450. La menue paille et les brins courts se perdent sur les grilles. La paille restante est brisée et il ne reste plus aucune tige entière dans l'andain.
En conséquence, le pick-up de notre presse a eu du mal à tout ramasser correctement et a laissé de la paille dans les chaumes. Si la paille n'est pas primordiale ou si elle est broyée, le régime 977 tr/min se révèle le meilleur pour tirer le maximum de la Tucano 470. Dans le cas contraire, mieux vaut opter pour un régime plus faible.
L'hybride remporte le match
Au catalogue Claas, les deux Tucano ont un prix sensiblement équivalent. La 470 coûte entre 6.000 et 10.000 € de plus que la 450. En prenant en compte la consommation de carburant par tonne de grain récolté de chaque machine, il est possible de connaître le coût d'utilisation du modèle conventionnel et de l'hybride en fonction des réglages choisis, notamment au niveau du rotor.
En rendement, l'hybride est nettement plus avantageuse que la moissonneuse conventionnelle. Ainsi, en configuration « débit maximal », la Tucano 470 récolte 300 ha quand, dans le même temps, la 450 n'en récolte que 200.
De plus, la Tucano hybride a fait preuve de sa polyvalence grâce aux différents régimes de son rotor. Un entrepreneur ou une Cuma peuvent donc alterner les chantiers sur lesquels la paille est primordiale avec un régime de 367 tr/min avec un travail à gros débit.