«La mammite est devenue une maladie banale, explique Ellen Schmitt, vétérinaire dans la Mayenne. Suivant mon conseil, les éleveurs traitent dès qu'ils repèrent les premiers symptômes. Cette réactivité est positive, car plus le traitement est précoce, plus les chances de guérison augmentent.» Mais la banalisation des tubes intramammaires pousse à une utilisation excessive. En France, on compte en moyenne 1,5 traitement antibiotique par vache et par an pour cause de mammite. C'est encore trop. Des résistances apparaissent. Dans la clientèle d'Ellen Schmitt, 50% des staphylocoques présents dans les élevages sont résistants à la pénicilline, et 30% des streptocoques sont résistants aux macrolides.
Identifier le germe
«Nous devons réduire le nombre de traitements à l'aveugle, en favorisant le produit adapté dans la mamelle qui a encore des chances de guérir.» Comment faire le tri? Dans une même lactation, si une vache rechute après une première mammite ou conserve des taux cellulaires élevés (plus de 200.000 pour une multipare, plus de 150.000 pour une génisse), c'est signe que le traitement n'était pas assez efficace. Une analyse bactériologique s'impose, afin d'identifier le pathogène en cause et vérifier d'éventuelles antibiorésistances. Le deuxième traitement sera ciblé sur le germe identifié. Si lui aussi échoue, aucun autre n'y arrivera. La vache est devenue incurable. Des traitements supplémentaires peuvent améliorer la situation à court terme, mais la rechute est inévitable. On cherchera d'autres solutions, par exemple un tarissement partiel du seul quartier infecté.
«Si ces cas sont trop fréquents, il faut soupçonner un problème global au sein de l'élevage, explique Ellen Schmitt. Dans ce cas, je propose à l'éleveur une visite de traite, avec audit de l'ambiance du bâtiment (ventilation, humidité, température de la litière…) et vérification de la machine à traire.»
En supprimant les sources d'agression de la mamelle ou de prolifération des germes, et en éliminant les vaches à cellules, on peut espérer atteindre l'objectif: moins de 20% de mammites par an et moins de 150.000 cellules dans le tank.
Comment traiter?Première mammite de la lactation: traiter avec un produit à large spectre, sur une courte durée. Objectif: plus de 70% de guérison. Sinon, revoir le traitement avec le vétérinaire. Deuxième mammite de la lactation ou vache à cellules: mammite «chronique». Identifier le germe et traiter avec un produit ciblé, sur une durée plus longue. Pas de guérison: mammite «trop chronique». La vache est devenue incurable, la rechute inévitable. |
Témoignage: ERIC CHAUVEAU, éleveur laitier à Averton (Mayenne) La machine à traire était beaucoup trop agressive Eric Chauveau était confronté à des mammites fréquentes (20 par an) chez ses 50 prim'holsteins, à un échec des traitements et à un taux cellulaire du tank élevé (entre 250.000 et 350.000 cellules). Ellen Schmitt, sa vétérinaire, a constaté une incidence forte des mammites à «Streptococcus uberis» (70% des cas) et un faible taux de guérison, sans observer d'antibiorésistance. Elle en a conclu à un problème plus général de santé de la mamelle. Il est apparu que la machine à traire était beaucoup trop agressive pour les trayons. «Nous avions un niveau de vide trop élevé et un rapport traite/massage trop violent», explique Eric. Un an après le nouveau réglage, le taux de guérison est passé à 90%, sans modifier le traitement alors que «S. uberis» reste le pathogène prédominant. «Je tourne entre 80.000 et 100.000 cellules et j'ai vu une seule mammite en deux mois.» |