Ils sont rares, les éleveurs, dans ces plaines maïsicoles des Hautes-Pyrénées ! Caroline Gaubert et Fabrice Dubertrand sont donc parmi les derniers des Mohicans, ajoutant une autre corde à leur arc : le maraîchage. Avec un point d’importance : aucun d’eux n’est enfant d’agriculteurs. Fabrice a certes repris la ferme de ses grands-parents, « mais j’ai dû aussi prendre des fermages, acheter du foncier, investir… », témoigne-t-il.
Après avoir été double actif pendant huit ans, le Haut-pyrénéen s’installe à 100 % en 2017, année où il passe aussi l’exploitation en bio. Au même moment, Caroline le rejoint en tant que conjointe collaboratrice et lance l’atelier maraîchage.
Côté élevage, « j’ai commencé avec 7 blondes, se souvient Fabrice. Pour amener un peu plus de rusticité, je les ai croisées avec du bordelais et du gascon ». Avant de faire rentrer, progressivement depuis cinq ans, des animaux de race lourdaise. Une race menacée, « la seule issue du berceau pyrénéen, se remémore-t-il. Il y en avait un peu dans toutes les fermes ici. C’est la vache à tout faire, rustique, qui a de bons aplombs, le cornage en lyre, un goût persillé, un gras naturel… ».

En matière de conduite, l’éleveur voit aussi beaucoup d’avantages à cette race. « Elle se nourrit à l’herbe et aux fourrages conservés, passe l’hiver à l’extérieur, le veau n’a pas besoin de tante (au contraire de la blonde), il pousse bien sans qu’il ne me coûte, la vache est tellement fertile qu’elle peut se faire saillir de nouveau un mois et demi après le vêlage, elle produit plus longtemps… ». Par ailleurs, dans ce territoire très touché par la MHE, « les blondes ont beaucoup souffert, on a eu 3 génisses et 2 vaches mortes, des avortements, des retards de saillies… Les Lourdaises, elles, ont perdu un peu d’état mais on n’a eu aucun dommage que ce soit sur les vêlages ou les changements de fertilité », assure-t-il.
Seul inconvénient : les vaches locales ont une croissance lente. Mais aucun doute pour le couple, la balance penche vers le positif. « Les Lourdaises sont moins conformées que les blondes, mais elles me rapportent bien plus, au final. Nous avons un petit chiffre d’affaires, donc l’objectif est de limiter les charges pour se sortir deux salaires ».
Autonome depuis deux ans
Depuis deux ans, l’exploitation est passée de 60 % à 90 % à l’herbe, mieux valorisée par la Lourdaise. C’est aussi depuis ce moment-là que la ferme est autonome. Une autosuffisance due également au fait que la moitié du troupeau lourdais fait de l’écopâturage pendant l’été dans le Gers. Par ailleurs, « on échange la moitié de notre fumier certifié contre des céréales et le reste contre de la paille. »

La Lourdaise, attelée, aide aussi parfois aux travaux de la maraîchère. Ici sont produits uniquement des légumes de saison, que Caroline vend sur un marché par semaine, dans un restaurant, une boutique bio, en livraison chez les particuliers à 15 km à la ronde et à la ferme. Quant à la viande, « un à deux veaux par mois et un bœuf ou une vache de réforme tous les deux à trois mois » sont écoulés, très majoritairement en colis ou en bocaux à la ferme et en petite partie sur le marché.
« Nous faisons tuer nos animaux à l’abattoir de Tarbes et la découpe, la mise sous vide et en bocaux se font à la conserverie de Vic Bilh (Pyrénées-Atlantiques). Pour écouler notre viande, on a aujourd’hui une clientèle régulière, que l’on prévient par mail, messages, réseaux sociaux et sur les marchés », énumère Caroline.
Maintenant que ce fonctionnement est bien en place, « on va doucement faire glisser le troupeau vers davantage de Lourdaise », indiquent les éleveurs. Autre objectif : « s’octroyer deux semaines de vacances avec le service de remplacement ! »