«Si je n’avais pas allongé la rotation blé dur-tournesol, j’aurais fini par perdre du rendement. Le désherbage devenait difficile. Pour réduire le ray-grass, je labourais tous les deux ans, mais je remontais en même temps des graines de xanthium qui s’incrustait dans les parcelles », explique Romain Planès, qui a repris l’exploitation familiale en 2008.

Pour trouver des solutions, ce jeune céréalier de l’Aude a misé sur le collectif. Il s’est engagé dans un GDA (1), puis un réseau de fermes Dephy (2) et un GIEE (3), animés par Loïc Doussat, technicien à la chambre d’agriculture. Dans ce cadre, Romain a revu progressivement l’ensemble de ses pratiques.

Améliorer le désherbage

Il a d’abord allongé sa rotation. Sur 245 hectares, le tournesol ne couvre plus que 60 ha. « Mon objectif est d’y revenir seulement tous les quatre ou cinq ans sur une même parcelle, pour diminuer la pression des maladies et avoir le temps de maîtriser le xanthium dans les autres cultures », explique-t-il.

Le blé dur, qui dégage la meilleure marge, occupe encore 100 ha. « Dans les sols profonds, j’y reviens tous les deux ans, en intercalant successivement une culture de tournesol, de pois chiche puis de sorgho », détaille Romain. Dans les petites terres caillouteuses, il enchaîne blé dur, tournesol, blé dur, orge et colza. « En diversifiant les cultures, j’ai un plus grand choix de matières actives, poursuit-il. Je les alterne dans la rotation, ce qui retarde l’apparition des résistances. »

En implantant le colza derrière l’orge, l’agriculteur réussit mieux cette culture. « Fin juin, j’ai quelques jours entre la moisson de l’orge et celle du blé dur. J’en profite pour préparer à l’avance les sols pour les semis de colza, tant qu’ils sont encore frais. » L’implantation du colza reste malgré tout délicate. « Cet été, j’ai dû irriguer pour assurer la levée », confie-t-il.

L’introduction du pois chiche et du pois permet à Romain de remplir de façon simple ses obligations en matière de surfaces d’intérêt écologique. Elle contribue également à la diminution des intrants. « Je n’apporte pas d’azote sur ces légumineuses, et je profite d’un reliquat de 20 U/ha sur le blé dur suivant », précise-t-il.

Pour maîtriser le salissement, l’exploitant s’est lancé dans le désherbage mécanique : « Après avoir fait des essais au sein du réseau Dephy, nous avons négocié en 2015 un achat groupé de matériel au sein du GIEE. J’avais déjà une bineuse en copropriété. J’ai acheté une houe rotative en 6 mètres et une herse étrille en 12 m. » En 2016, le céréalier a utilisé ce matériel sur les cultures de pois, pois chiche et sorgho, et a fait des essais sur tournesol et blé dur. « Sur pois, avec deux passages de houe rotative avant le stade 8 feuilles, à partir duquel les vrilles s’accrochent entre elles, je n’ai pas eu à appliquer de désherbant, ajoute-t-il. Il y avait un peu de folle avoine, mais cela n’a pas affecté le rendement. » En sorgho, Romain a désherbé mécaniquement deux fois avant le stade 3 feuilles : « J’ai ainsi cassé une croûte formée par les orages et sauvé le semis. » Il n’a ensuite fait qu’un traitement contre le xanthium, difficile à contrôler avec le désherbage mécanique, qu’il a complété par un binage.

Méthodes complémentaires

Avec la herse ou la houe, l’agriculteur intervient tôt, avant même de voir les adventices. « L’efficacité est meilleure lorsqu’on les arrache au stade filament », explique-t-il. Pour éviter de perturber le semis, il sème en dessous de la zone de deux centimètres dans laquelle ces outils travaillent.

En introduisant le désherbage mécanique, l’économie a été en 2016 de 50 €/ha en tournesol et de 41 €/ha sur sorgho, sans perte de rendement. « Quand j’aurai amorti le matériel, je réduirai encore plus les coûts », note l’exploitant, qui mise sur la Cuma ou la copropriété pour maîtriser les charges de mécanisation. Ces nouveaux outils nécessitent un apprentissage. « En groupe, avec l’aide du technicien, nous mutualisons nos expériences et nous progressons plus vite », note-t-il.

Romain apprécie de sortir moins le pulvérisateur. « Mais je ne veux pas me priver d’intervenir chimiquement quand c’est nécessaire, affirme-il. Je tiens à pouvoir utiliser les deux modes de désherbage. Ils se complètent pour s’adapter au mieux à la situation de l’année. »

(1) Groupement de développement agricole.

(2) Exploitations agricoles engagées dans une démarche volontaire de réduction de l’usage de pesticides.

(2) Groupement d’intérêt économique et environnemental.