Sous leur serre à panneaux photovoltaïques, Sylvain et Julien Bernard, qui ont repris l’exploitation familiale située à Uchaux, dans le Vaucluse, ont créé un potager taille XXL. Depuis 2020, les deux frères font pousser en pleine terre des asperges vertes, des tomates rondes, cerises rouges, jaunes, de la noire de Crimée, mais aussi des poivrons, des concombres, des blettes, des épinards, de la mâche… Cet été, ils ont même implanté des fraises et des pastèques sur, respectivement, 1 500 m². « Les fraises ont été un échec, confie Sylvain. Nous nous sommes laissés dépasser par les attaques de la mouche drosophyle. Quant aux pastèques, elles ont fait un rendement élevé ! Nous recommencerons, l’an prochain, mais sur une surface moindre. On apprend un nouveau métier. »

Mesure des besoins en eau
L’exploitation de 95 ha est, en effet, spécialisée dans la tomate d’industrie et les grandes cultures. Depuis plusieurs années, Sylvain Bernard veut réintroduire le maraîchage, abandonné par son père à cause des aléas climatiques. Car le chiffre d’affaires à l’hectare de cette production est cinq fois supérieur à celui de la tomate d’industrie. Après avoir visité en 2015 l’exploitation de Johan Bernardin, agriculteur en Charente-Maritime, qui cultive du maraîchage sous serre photovoltaïque, les deux frères décident de se lancer.
La serre a été livrée par la société Reden Solar en 2019. « Elle n’a rien à voir avec les chapelles ultra-modernes, indique l’agriculteur. C’est une serre simple, qui a pour tout équipement un ordinateur qui sert à gérer les panneaux de ventilation. » Sylvain et Julien ont donc investi 120 000 euros dans une station de ferti-irrigation gérée par ordinateur, ainsi que dans des structures de palissage pour la conduite des tomates, des concombres et des poivrons. S’y ajoutent trois nacelles pour effectuer les travaux sur les plantes et des chariots de récolte. « Le système d’irrigation représente 50 % de cette dépense, souligne Sylvain. Nous produisons un grand nombre d’espèces, qui ont des besoins en eau différents. Chaque culture doit donc être pilotée à la carte. »
Dans la serre, qui se divise en deux parties dans le sens de la longueur, les cultures sont réparties, de part et d’autre, sur seize travées de 9 mètres de largeur. Ces dernières sont jalonnées de trente-deux électrovannes pour le goutte-à-goutte, et autant pour la micro-aspersion, qui se déclenchent à la demande et à la juste dose. « Pour mesurer les besoins en eau des plantes et en solutions nutritives, nous utilisons des sondes capacitives Syntek, précise l’exploitant. Elles sont positionnées entre deux plants et deux goutteurs. »
En 2020, Sylvain et Julien ont récolté, sur 9 000 m², 17 kg de tomates par pied. Cette année, la culture devrait avoisiner 19 à 20 kg par pied. « Petit à petit, nous nous améliorons, confie le serriste. Ainsi, l’irrigation a été mieux pilotée et nous devenons plus pointus sur les opérations de taille. La première année, nous avions retiré trop de bouquets. »
Pas de traitement chimique
Une autre difficulté rencontrée est le manque de luminosité de la serre, en raison de la présence des panneaux photovoltaïques sur la toiture. « Nous avons dû diminuer la densité de plantation de 15 à 20 % par rapport à une serre classique, afin de laisser pénétrer au maximum la lumière entre les plantes », précise Sylvain. Sous abris, les cultures sont, en revanche, moins sensibles aux maladies.
L’agriculteur n’effectue aucun traitement chimique. Il a recours à la lutte intégrée et aux produits de biocontrôle – souffre, cuivre – pour lutter contre le mildiou et l’oïdium. Afin de maîtriser les adventices, il implante ses cultures sur du paillage plastique. L’interrang est recouvert de bâches blanches tissées. Rien ne pousse, excepté les légumes.
Chantal Sarrazin