Le chimiste allemand Bayer a annoncé, le 14 septembre, avoir acheté pour presque 59 milliards d’euros Monsanto, le géant américain des semences et des produits phyto (dont le Roundup). Cette acquisition, qui devrait être bouclée d’ici à la fin de 2017, est la plus chère jamais payée par un groupe allemand.
Monsanto ne s’est pas laissé convaincre facilement et il a fallu que Bayer relève à plusieurs reprises son offre, depuis la toute première formulée en mai 2016, avant d’obtenir l’accord de l’américain. Par ailleurs, le groupe allemand s’engage à verser une indemnité de 2 milliards de dollars (1,78 milliard d’euros) à Monsanto si l’opération échouait, preuve de sa confiance dans sa capacité à obtenir le feu vert des autorités de la concurrence.
« Cette transaction regroupe deux entreprises différentes, mais hautement complémentaires », assure Bayer. L’entreprise née de la fusion bénéficiera du leadership de Monsanto dans les semences et de la large gamme de produits de protection des plantes de Bayer. Les deux groupes entendent aussi accélérer la numérisation de l’agriculture. Le budget en recherche et développement annuel de la nouvelle entité devrait atteindre quelque 2,5 milliards d’euros.
Le tout nouveau patron de Bayer, Werner Baumann, a assuré pouvoir gérer la réputation controversée de Monsanto, espérant la contrebalancer par l’image de son propre groupe.
« Mariage infernal »
Bruxelles va étudier les conséquences de ce rachat pour le marché européen. En Allemagne, où l’opposition aux OGM est farouche, la reprise de Monsanto par un des noms historiques de l’industrie nationale est mal vue par les ONG, qui y voient un « mariage infernal », et certains agriculteurs, qui craignent de se retrouver pieds et poings liés face à un seul fournisseur pour leur approvisionnement. En France, la Confédération paysanne dénonce la création d’un « monstre » qui « met en danger la souveraineté alimentaire ».
Cette fusion intervient dans un contexte de concentration dans le monde de l’agrochimie. Confrontés à la faiblesse mondiale des prix des matières premières, les américains Dow Chemical et DuPont ont décidé de se marier, ce que Bruxelles est en train d’examiner de près. Le chinois ChemChina veut aussi racheter le suisse Syngenta, un temps courtisé par Monsanto. Derrière ces mastodontes, le groupe allemand BASF, qui a refusé de se jeter dans l’arène pour le rachat de Monsanto, regarde avec attention les éventuelles cessions d’activités que les autorités de la concurrence pourraient exiger.