Quelles conclusions tirez-vous de votre consultation sur l’éducation alimentaire ?

Lancée pendant le dernier Salon de l’agriculture, la consultation publique posait au grand public la question « Comment sensibiliser et éduquer nos enfants à l’alimentation ? ». 727 propositions ont été déposées. Elles ont suscité plus de 80 000 votes de février à avril. Le public répondant correspondait, en âge, à la population générale en France mais nous avons remarqué une nette domination des femmes (75 %). En conclusion, le sujet de l’alimentation est très consensuel et n’est pas le sujet de grandes controverses.

Les Français tissent un lien serré entre l’alimentation et la santé. Ils attendent de l’éducation alimentaire qu’elle favorise les produits locaux, frais, bruts et veulent, au contraire, limiter les aliments industriels. Il se dégage de la consultation quatre leviers d’action : apprendre à cuisiner dans des ateliers en manipulant les produits et pas avec des applications digitales ; les cantines scolaires sont le lieu des parcours pédagogiques pour monter en compétence sur la diététique ; insister sur le lien entre l’alimentation et le monde agricole ; la famille reste le lieu du partage et de la convivialité, même s’il vient après les cantines scolaires comme lieu de la pédagogie alimentaire. Enfin, le prix de l’alimentation est souvent évoqué en demandant aux acteurs de mener une réflexion sur l’accès à une alimentation saine et fraîche.

Par quoi commencer pour bâtir un programme d’éducation alimentaire efficace ?

Nous n'allons pas apprendre aux professeurs des écoles à faire leur travail pédagogique. En revanche, avec ces résultats, nous voulons interpeller les ministères sur la réflexion à mener pour introduire l’alimentation dans tous les programmes. On peut faire des maths ou du français avec des produits agricoles. Je dis bien les ministères, au pluriel, parce que je pense à celui de l’Agriculture, bien sûr, mais aussi à celui de l’Éducation nationale et de la Santé.

Les agriculteurs eux-mêmes ont-ils leur part du travail à faire ?

Les agriculteurs doivent pouvoir aller devant les classes. Parmi toutes les réponses, j’ai relevé une proposition d’Eléa qui a participé à la consultation publique : « Il faut faire le lien entre l’aliment et l’agriculture en allant visiter des fermes, en rencontrant des agriculteurs. » Concrètement, on peut réunir un éleveur de volailles, de vaches et un céréalier. Avec eux, on a des œufs, du lait et de la farine. Faisons des crêpes avec les enfants ! D’un autre côté, les agriculteurs eux-mêmes ne doivent pas avoir peur de prendre la parole. Ils sont leurs meilleurs ambassadeurs auprès des enfants et de tout le monde. C’est ce que Agridemain tente de mettre en œuvre en organisant les Journées nationales de l’agriculture . C’est l’occasion d’ouvrir les fermes et les industries alimentaires.

Dans le monde de la nutrition, des voix s’élèvent pour lier les recommandations alimentaires au climat. Qu’en pensez-vous ?

Dans la consultation, les Français ne nous en parlent pas. En tous les cas, pas aussi directement. Mais quand ils demandent des produits bruts, locaux et de saison, ils apportent déjà une réponse. Ils ne veulent pas des produits de l’autre bout du monde. Quant à la question de la viande, j’ai lu des propositions visant à réduire d’un tiers la viande dans les recommandations alimentaires. Si c’est pour la remplacer par des substituts ultratransformés, je ne suis pas d’accord. Si c’est pour ajouter des produits végétaux qui viennent de l’autre bout de la planète, ça ne répondrait ni à la lutte contre les gaz à effet de serre, ni à la volonté des Français, telle que nous avons pu la recueillir avec cette consultation.

(1) La fondation Make.org et Open Agri Food, avec le soutien du Club de la table française et du Salon de l'Agriculture.