Quelles sont vos attentes envers la nouvelle ministre de l’agriculture, Annie Genevard, notamment à propos de la crise sanitaire actuelle ?

« Nous attendons que le modèle d’élevage français soit défendu, et qu’elle porte notre voix à Bruxelles, insiste Emmanuel Bernard, le président de la section bovine de l’interprofession du bétail et de la viande (Interbev). Au niveau européen, nous avons besoin d’une banque d’antigènes pour créer des vaccins plus rapidement. C’est la clé des échanges commerciaux. Il faut pouvoir réagir vite pour protéger nos animaux, limiter les pertes de production, et fluidifier les échanges. »

« Nous voyons bien que nous sommes tous touchés par le changement climatique et en premier par ces épizooties. Cela nécessite une gestion collective au niveau européen et un accompagnement de l’État pour fournir gratuitement les vaccins. Nous sommes obligés d’anticiper, via une veille sanitaire, car les maladies viennent désormais de partout. »

Dans ce contexte sanitaire, quelles sont les difficultés à lever pour les échanges commerciaux ?

« Au niveau de la loi de santé animale (LSA), nous insistons sur le besoin d’avoir un cadre adaptable pour être plus réactif en cas de maladie émergente. La LSA intègre des contraintes qui perturbent le commerce, et nous demandons que ce soit rectifié. L’intérêt serait d’avoir une vision transversale et globale de la gestion de l’ensemble des maladies au niveau européen, en prévoyant des dérogations dans un contexte de crise et des mesures de gestion des mouvements qui prennent en compte la vaccination et les résultats d’analyses PCR. Sur ce point, il semblerait que la révision sera faite au début de 2025, mais nous avons besoin dès cette année, de garanties de la part de la Commission européenne. »

Les deux millions de doses de vaccin contre la maladie hémorragique épizootique (MHE) commandées par l’État sont-elles suffisantes ?

« Nous demandons davantage de doses. La stratégie vaccinale décidée par l’État pour freiner la progression de la maladie doit être renforcée. La disponibilité des doses a limité dans un premier temps le périmètre de la zone tampon, mais il faut que l’État continue de commander des doses pour augmenter le périmètre de cette zone puis, à terme, permettre à tous les éleveurs de vacciner leur troupeau. »

« Les conséquences de ces maladies sur la santé des troupeaux nous alarment. Ce qui nous inquiète également, ce sont les effets indirects sur les troupeaux et en particulier les conséquences sur la fertilité de nos animaux. Nous aimerions être soutenus pour réagir vite. »

Un vaccin contre la fièvre catarrhale ovine de sérotype 3 (FCO-3) a été agréé pour l’autorisation à l’exportation des animaux. Quelle stratégie vaccinale adopter ?

« Nous laissons la priorité aux éleveurs ovins qui subissent des pertes lourdes dans leurs cheptels. Le problème est encore une fois la disponibilité et l’accès aux doses. Le vétérinaire doit réaliser la vaccination pour qu’elle soit certifiante pour les échanges ; ça ne se fait pas en deux jours ! D’où l’intérêt d’anticiper davantage avec une banque d’antigènes européenne, pour éviter de se retrouver dans ces situations où, malgré la volonté des éleveurs de vacciner, ils n’ont pas accès aux doses. »