Les Comptes de l’Agriculture, présentés le 13 décembre, anticipent une baisse de 26 % des revenus agricoles par actif non salarié, entre 2016 et 2015. La profession réagit. « Une année noire pour l’agriculture française, où tous les secteurs sont concernés », déplorent les Chambres d’agriculture dans un communiqué. Elles remettent en cause un « mauvais fonctionnement des filières, l’absence de logique partenariale entre les acteurs des filières, et la question non résolue de la répartition de la valeur ajoutée ». Elles rappellent enfin que « l’exigence est à la régulation des marchés agricoles et attendent des propositions fermes dans le cadre de la future Pac 2020, que ce soit en termes de lissage des prix ou de dispositifs assurantiels ».
« Les coopératives doivent servir les agriculteurs »
« Une année 2016 des plus sombres pour toute l’agriculture française », s’inquiète la Coordination rurale (CR), qui « espère un retour au bon sens » en faveur de la régulation des productions et des marchés. « Les coopératives, pilotées pour la plupart par le syndicalisme majoritaire, ont quant à elles tout leur rôle à jouer pour retrouver leurs missions fondamentales qui est de servir les agriculteurs, et non les asservir », dénonce la CR.
La Confédération paysanne dénonce un « travail de moins en moins rémunéré ». Le syndicat rejette la « multiplication d’assurances revenu dans la future Pac » pour régler le problème : « cette proposition est inacceptable et démontre un réel mépris de la réalité des paysans ». La Confédération propose d’étudier « un droit au revenu basé sur une rémunération garantie pour un volume produit, liée au prix de revient, et en interdisant la vente à perte ».
« Mobiliser l’Europe »
L’AGPB, la section spécialisée des producteurs de blé de la FNSEA, estime les revenus de 2016 des céréaliers spécialisés négatifs, à - 24 000 €/actif, après un revenu de 16 700 € par actif non salarié en 2015. « Le plan d’urgence ne comprend que des mesures de trésorerie qui tardent à se mettre en place. Il y manque un soutien direct de l’Europe dont le silence est incompréhensible en de telles circonstances.
Il appartient au Gouvernement de l’obtenir », demande le syndicat dans un communiqué du 14 décembre 2016. Il réclame une « mobilisation de l’Europe » ainsi que des outils, sans attendre 2020 : « une épargne de précaution librement gérée, une assurance climatique réellement efficace et largement diffusée avec un seuil et une franchise de 20 % subventionnées ».
La FNSEA pointe les « 5 milliards de perte » du résultat agricole 2016 : « c’est inacceptable économiquement et humainement ». Pour le syndicat majoritaire, « l’État et la BPI doivent mettre les bouchées doubles pour que le fonds de garantie et l’année blanche s’appliquent pleinement et soient ouverts jusqu’au 30 juin, car les difficultés de trésorerie des agriculteurs sont malheureusement encore devant nous ».
La faute du Gouvernement ?
Chez l’équipe de campagne de François Fillon, la critique est sévère : le Gouvernement actuel serait en partie responsable de la situation catastrophique des agricultures. « La négation de la gravité de la crise […], le manque de vision et de politique agricole ambitieuse, […] l’absence de réponses structurelles aux défis que rencontre notre agriculture »… Le candidat de droite promet de rendre l’agriculteur « entrepreneur », avec une politique de gestion des risques et des crises.
Le Modef, syndicat des exploitants familiaux, alerte sur « la situation de détresse des exploitants familiaux », et réclame « des mesures d’encadrement pour sortir les exploitants familiaux de la vente à perte, […] avec un coefficient multiplicateur entre les fournisseurs et la grande distribution ». Le syndicat appelle aussi à des mesures de sauvegarde : « prêts à taux zéro pour tous les agriculteurs en difficulté avec un report d’un an sur les intérêts, versement automatique de la prime d’activité pour ceux qui touchaient la prime à l’emploi, mise en place d’une cotisation sociale minimum de 1 000 € pour les exploitants en difficulté afin qu’ils puissent conserver les mêmes droits sociaux à moindre coût ».