Planteurs à Léalvillers, dans la Somme, Henri Delannoy a augmenté sa surface de betteraves livrées à Saint Louis Sucre en 2017, passant de 8 à 18 ha. Cette hausse des volumes a été synonyme d’un allongement des périodes d’arrachage et de stockage au champ. Suivant les consignes de l’industriel, il a couvert dès la première année les tas dont l’enlèvement était planifié en décembre ou janvier. « J’avais acheté des bâches à poser manuellement, se souvient-il. Mais je n’imaginais pas que cela serait si pénible. Le jour de l’installation, il y avait du vent et, à cinq personnes, nous n’étions pas de trop pour les manipuler. Ensuite, nous les avons lestées avec des palettes et des pneus. Cela fait beaucoup de manipulations. Il ne faut pas non plus que les bords reposent directement sur la terre, sinon, la bâche colle au sol et une croûte se forme, lui faisant perdre toute sa souplesse. Elle devient alors très lourde à manipuler. »

Compte tenu des contraintes rencontrées, à l’automne 2018, Henri Delannoy a opté pour un bâchage et un débâchage mécanisés, proposés par Saint Louis Sucre. Une prestation assurée par l’ETA Sorel, qui intervient avec du matériel allemand Klünder. Attelée à l’arrière du tracteur, la machine se compose d’un bras hydraulique repliable, terminé par un axe rotatif. Entraîné par un moteur hydraulique, il s’enfile dans le tube de la bâche. Le chauffeur place alors celle-ci sur le tas et avance en la déroulant. Deux opérateurs à pieds sont positionnés de chaque côté pour l’installer. Une fois l’ensemble recouvert, le tracteur refait le tour pour la fixer au tas. Son relevage avant est équipé d’un bras muni d’un disque en Téflon motorisé hydrauliquement. En appuyant le disque contre la bâche, le chauffeur l’insère sous la base du tas où elle reste amarrée. En principe, il n’est pas nécessaire de prévoir du lestage supplémentaire.

Pour le débâchage, le prestataire réutilise les mêmes tubes, longs de 6 mètres. La toile est retirée du tas et enroulée le plus soigneusement possible avant d’être stockée jusqu’à l’année suivante.

Des silos adaptés

La protection évite les dégâts du gel jusqu’à des températures de - 5 °C à - 6 °C. Les bâches géotextiles sont disponibles en différents formats selon la largeur du tas de betteraves. « Il existe aussi plusieurs longueurs, mais généralement la surface totale n’excède pas 500 m², explique un commercial. Au-delà, il se pose des problèmes de poids car, lorsqu’elle est mouillée, la bâche absorbe jusqu’à 1 l d’eau par mètre carré. Si nous en proposions de très grandes, elles seraient souvent trop lourdes au moment de la reprise, avec des risques de déchirures ou de casse du matériel en raison du travail en bout de bras. »

Pour simplifier l’organisation, Saint Louis Sucre planifie les chantiers avec l’ETA. « Avec une pose manuelle, je devais me tenir prêt à tout moment pour retirer la bâche avant l’enlèvement du tas, souligne Henri. Désormais, je ne m’occupe de rien. Même la fourniture des géotextiles est incluse dans la prestation. Ma principale obligation est de laisser un passage de 4 m autour du silo pour le tracteur et une zone de 15 à 20 m environ en bout de silo pour la mise en place. Il faut aussi un tas régulier en hauteur et ne mesurant pas plus de 14 m de largeur, car l’ETA utilise des bâches de 18 × 35 m. » L’idéal est d’avoir un silo pointu, sans cavité où l’eau pourrait stagner. Si le tas est réalisé en versant deux bennes côte à côte, il est recommandé de finaliser le silo en vidant des betteraves sur le dessus avec l’arracheuse intégrale. Sinon, un nivelage du tas évite de laisser des creux.

Moins de tare-terre

Le coût de la prestation est de 1,30 € par tonne de betteraves couvertes. En contrepartie, Saint Louis Sucre reverse 0,65 € d’indemnités de protection, ce qui ramène le prix final du chantier à 0,65 €/t, prélevé du montant payé par l’industriel. Depuis qu’il bâche certains silos, Henri a constaté un effet positif sur la tare terre : « Le géotextile empêche l’eau de rentrer dans le tas, mais il laisse passer l’air, explique-t-il. Après quelques semaines, la terre sèche et se décolle plus facilement au moment de la reprise avec le déterreur. Désormais, quand je sais qu’un silo sera couvert, je recommande au chauffeur de l’arracheuse de ne pas régler trop fort sa chaîne de nettoyage. Je préfère récolter des racines un peu plus sales mais sans choc car elles se conserveront mieux et la terre sera facilement éliminée. » Un avantage mis en avant par tous les industriels, avec des baisses constatées de 2 à 4 points de tare-terre. Les betteraves sont plus saines et les camions transportent moins de terre.

Denis Lehé