«Théoriquement, si un parent veut avantager l’un de ses enfants, il peut le faire de façon officielle en le gratifiant d’une donation », rappelle Myriam Gobbé, avocate associée spécialiste en droit rural pour le cabinet Avocats Liberté, à Rennes (Ille-et-Vilaine). La donation peut se faire soit :
• En avancement de part successorale (donation anciennement appelée « en avancement d’hoirie »), auquel cas, elle devra être rapportée à la succession lors de leur décès, ce qui veut dire que la valeur des biens donnés devra être prise en compte dans la masse à partager entre les héritiers pour permettre le calcul de la part de chacun de façon égalitaire.
• Hors part (anciennement dite « par préciput »), auquel cas l’enfant qui a été gratifié n’aura pas à rapporter cet avantage. À condition qu’il n’y ait pas atteinte à la « réserve héréditaire » des autres enfants. L’héritier donataire est, donc, privilégié par rapport aux autres héritiers puisque cette donation hors part constitue un supplément sur héritage pour l’héritier qui en bénéficie.
« Il arrive que des parents souhaitent avantager un seul de leurs enfants en dehors de tout acte officiel. En pratique, cette gratification peut intervenir soit en diminuant la valeur de biens cédés, soit, même, en s’abstenant de solliciter le règlement du prix fixé. Il s’agit, dans ces hypothèses, de ce qui peut être qualifié de donations déguisées ou indirectes », confirme l’avocate.
« Vos parents sont libres de vendre leur patrimoine comme ils le souhaitent. Le recours n’existe qu’au décès du parent ou des parents qui ont cédé le ou leurs bien(s) à un prix inférieur à leur valeur réelle. Mais la charge de la preuve repose sur celui ou ceux qui se prétendent lésés. Ils devront justifier que les biens ont effectivement été cédés à une valeur inférieure à leur prix réel. Le cas échéant, une expertise pourra être ordonnée », détaille Myriam Gobbé.
Ces donations déguisées peuvent prendre la forme d’une absence de demande de fermage ou de loyer pour des biens appartenant aux parents, dont l’enfant a pourtant une jouissance exclusive. À noter que si vous avez travaillé en qualité d’aide familial sur l’exploitation sans percevoir de rémunération, vous pourrez faire valoir sur la succession une créance de salaire différé.
En résumé, les parents peuvent vendre les biens à un prix inférieur au marché (sous réserve d’un redressement fiscal), mais avec un risque de remise en cause de cet acte par les autres héritiers dans un délai de cinq ans suite à leur décès.