«Lorsqu’un propriétaire décède sans héritiers ou s’ils refusent la succession, le notaire ou toute autre personne intéressée (un créancier) peuvent saisir le juge aux fins de désignation d’un curateur de la succession en la personne du service de l’État chargé des Domaines », explique François Moulière, avocat associé au cabinet Avoxa, à Rennes. Après désignation et à l’issue d’une première période de six mois, le curateur peut effectuer tout acte conservatoire ou d’administration permettant de désintéresser les éventuels créanciers. L’objectif est d’apurer le passif de la succession ou de vendre un bien dont la conservation est difficile ou onéreuse.
« Si un bail rural est en cours, le service des Domaines doit respecter le droit de préemption du preneur en place. Cette règle d’ordre public s’impose au curateur même si celui-ci procède selon un appel d’offres. Seuls les biens effectivement loués par le preneur peuvent être préemptés. Le service des Domaines aurait donc dû respecter le droit de préemption sur le foncier », constate l’avocat.
Dans ce cas, le preneur peut solliciter l’annulation de la vente et une indemnité pour le préjudice subi sur le fondement de l’article L. 412-12 du code rural. Il ne peut néanmoins pas se substituer à l’acquéreur. La sanction de la substitution n’est envisageable que si la vente à un tiers a été conclue en méconnaissance du délai de deux mois, prévu pour permettre au preneur d’exercer son droit de préemption ou à d’autres conditions ou prix que ceux présentés au preneur (article L. 412-10 du code rural).
« Mais ces deux actions ne sont possibles que dans les six mois à compter du jour de la connaissance de la vente, indique l’avocat. En revanche, la liquidation de la succession n’est enfermée dans aucun délai particulier. Néanmoins, la curatelle confiée à l’État ne peut durer indéfiniment et lorsqu’à l’issue de la vente et du désintéressement des créanciers, la succession comporte encore des actifs, l’État doit diligenter une procédure auprès du tribunal afin d’être définitivement reconnu comme propriétaire. » L’État ne peut être contraint à vendre mais le droit de préemption du preneur en place s’impose à lui.