« C’est inné de dire “Non”, mais l’enfant désapprend, explique Margot Fried-Filliozat, sexothérapeute à Paris (1). Il apprend à se conformer, à être gentil. Or, quel message lui fait-on passer en lui demandant d’obéir systématiquement ? De ne pas écouter son propre “Non”. Éduquer au consentement passe par accepter le refus de l’enfant. Rappelons-lui qu’il a le droit de dire nous dire “Non” et qu’il continuera d’être aimé. Ainsi, il peut acquérir cette compétence même face à quelqu’un qui a l’autorité, et malgré sa peur de décevoir. »
« Rappeler ce qu’est le consentement »
« En famille, s’entraîner à communiquer sur ce que l’on ressent est primordial, tout comme rappeler ce qu’est le consentement. Consentir, ça fait “Oui” dans le corps, dans le cœur et dans la tête. Pour montrer l’exemple, le parent peut dire à haute voix quand il se réjouit : « Oh, ça me fait “Oui” ! » Il arrive aussi que ça fasse “Oui” dans la tête et “Non” dans le corps, lors d’une prise de sang, par exemple. Par contre, quand on ne sait pas vraiment de quoi il s’agit, qu’on est trop jeune pour ce que qui est proposé, qu’on est sous contrainte, et qu’à l’intérieur ça serre le ventre, c’est un vrai “Non”. »
« La sexualité est taboue, nous n’en parlons pas, ni des violences sexuelles, poursuit Margot Fried-Filliozat. Même si c’est inconfortable à aborder, il est fondamental d’ouvrir la discussion, et plus facile avec un livre entre les mains. Cela donne des ressources (vocabulaire, rappels de la loi, endroits d’aide), pour se sentir équipé, et sécurisé, si jamais cela se produit. Le gouvernement français indique que trois enfants par classe sont victimes d’inceste qui est un crime. Autrement dit, tous les enfants connaissent un enfant agressé sexuellement. »

« L’engrenage du silence »
« En grande majorité, les victimes connaissent leur agresseur et sont prises dans l’engrenage du silence. À l’âge adulte, elles disent : je savais que c’était mal, je n’aurais pas su quoi dire, ni à qui le dire. A fortiori quand l’agresseur a formulé des menaces exerçant son pouvoir de domination. Celle ou celui qui a peur réagit par l’attaque, la fuite, ou bien se fige. Elle ou il peut aussi se suradapter et se soumettre. »
« Parfois, la situation est telle que l’enfant ne peut pas dire “Non” à son ascendant. Il est important de mesurer chaque situation, et de ne pas culpabiliser de n’avoir pas su dire “Non”. La honte empêche de parler, par peur de pas être compris et d’être rejeté. Si un adulte de confiance prend le temps d’ouvrir le dialogue à ce sujet, l’enfant victime et ceux qui portent les “secrets poisons” ont des mots, des ressources pour sortir du piège du silence imposé. »
(1) https://www.margotfriedfilliozat.com, autrice avec la psychothérapeute Isabelle Filliozat de « Mon corps m’appartient ! » (Éditions Nathan — 2022), 7,90 € — 47 pages, à partir de 7 ans.