« Travailler en couple peut être une expérience enrichissante affectivement et professionnellement, explique Gersende Pellat, sexologue et thérapeute de couple. Toutefois, si le statut de l’un des conjoints n’est pas bien défini ou si la répartition des tâches n’est pas claire, cela peut susciter des frustrations, un déséquilibre, voire une dépendance financière. Par ailleurs, le métier d’agriculteur peut engendrer une grande fatigue physique et un épuisement émotionnel. Cela peut altérer la communication, l’envie de partager, l’intimité et, par conséquent, la sexualité. »

« S’imposer, une à deux fois par semaine, un moment de qualité à deux »

« Contrairement aux couples de salariés qui arrivent à recréer une intimité pendant les vacances, les exploitants agricoles n’ont pas toujours cette possibilité. Alors, je leur conseille de s’imposer, une ou deux fois par semaine, un moment de qualité à deux : aller faire une balade, partager une activité (partie de ping-pong, etc.), prendre un repas en tête à tête, sans écran et sans enfants, durant lequel ils parlent mais pas de travail… Si les conversations ne concernent que les décisions à prendre, les rendements, l’organisation de la ferme, le lien affectif entre les conjoints peut disparaître. »

« Il faut apprendre à parler de soi et de ses ressentis. Il est important de se séduire, de se surprendre, d’être attentionné à l’autre, de le regarder comme un conjoint et non un associé. Il s’agit de nourrir l’intimité, la complicité et donc la sexualité malgré la fatigue. Cela passe par des gestes de tendresse, des mots, des caresses. Ne pas hésiter à exprimer ses envies. Quand il y a conflit, par exemple si une réflexion est mal passée au travail, s’interroger : la source est-elle dans le professionnel ou dans le personnel ? J’invite les conjoints à s’imposer des rendez-vous, tout comme on fixe une réunion, pour parler uniquement de leur couple, idéalement une fois par mois ou tous les deux mois. »

« Décréter des zones sans travail »

« Enfin, quand la maison d’habitation est sur l’exploitation, j’encourage à décréter des zones sans travail comme la chambre à coucher ou alors décider qu’on ne discute pas de travail à table ou plus à partir d’une certaine heure. »

Gersende Pellat est sexologue et thérapeute de couple. (© Sébastien Fauchere )

« Travailler ensemble permet une grande connaissance de l’autre. Si chacun a sa place et que les rôles sont clairement définis, il en sort une complicité, la fierté de bâtir ensemble, d’avoir un projet commun, de partager des valeurs. Ce sont souvent des couples qui se soutiennent dans les coups durs et dans les réussites. Mais attention : des gens qui ont des vies très entremêlées en arrivent parfois à accepter un couple très dysfonctionnel. Un thérapeute peut les aider. De plus en plus consultent à distance. »