Dès les premières attaques de loups en 2015, la ferme expérimentale de Carmejane (Alpes-de-Haute-Provence) s’est dotée de chiens de protection. Le diagnostic de vulnérabilité réalisé en amont mettait en avant la fragilité de l’exploitation face aux prédateurs, notamment en raison de la présence de nombreux lots, liés aux besoins d’expérimentations.
«aucune expérience de ces chiens» de protection
« Nous n’avions aucune expérience de ces chiens, se souvient Marie Marmuse, formatrice depuis trois ans au CFPPA après avoir occupé le poste de technicienne sur la ferme. Un éleveur nous a prêté un de ses chiens au début. Et nous avons rapidement mis en place le parc double enceinte. »
Dès l’année suivante, huit chiots, en provenance d’Italie et issus de deux fratries, sont arrivés auprès des brebis. « Nous avions choisi des bergers des Abruzzes, réputés pour leur sociabilité », explique-t-elle.
Avec le recul, les responsables estiment qu’il vaut mieux prendre un ou deux chiens, mais surtout pas huit en même temps. « Les fratries doivent être séparées, à la différence de ce que les Italiens nous avaient conseillé, ajoute-t-elle. Les chiens s’attachent les uns aux autres, alors qu’ils doivent s’attacher au troupeau. » Dans les années qui ont suivi, les intervenants de la ferme se sont appuyés sur des formateurs reconnus.
Ne pas utiliser la force
La mise en place du chiot n’est pas la phase la plus compliquée, selon la formatrice. L’adolescence, entre l’âge d’un à deux ans, est ponctuée de comportements pas toujours facile à « lire » et à corriger. Il faut prendre le temps d’observer les chiens, parfois à leur insu et leur faire comprendre que ce n’est pas bien. « C’est ainsi que nous avons procédé avec Scott. Il tirait la laine des brebis. Il a fallu le prendre sur le fait pour lui signifier le “Non !”, sachant que la technique du bâton ne fonctionne jamais, alerte-t-elle. L’utilisation de la force est contreproductive. Les chiens deviennent peureux et cela ne fait qu’amplifier les problèmes. »
La génétique des parents est un point essentiel pour choisir le chiot. « Pour ceux qui vont à l’étranger, comme nous l’avons fait la première fois, il faut bien maîtriser la langue pour recueillir des informations fiables et précises, signale-t-elle. Comme pour les chiens de conduite, il convient de s’assurer que les parents travaillent bien au troupeau. » Le comportement du chiot étant en effet influencé à la fois par l’inné (la génétique) et l’acquis (son éducation). Plus l’inné est important, moins l’éducation sera difficile à mettre en place. Enfin, « l’agressivité n’est pas une qualité, précise Marie Marmuse. Le chien de protection n’a pas vocation à se battre, son rôle est de donner l’alerte. »