« L'art est essentiel, il dénonce, il interpelle, il soulage, il guérit ». Ces quelques mots, extraits d'un de ses poèmes, reflètent bien l'état d'esprit de Bernard Froment. Cet agrisculpteur, comme il aime se définir, est un homme de la terre, un homme du vivant. Installé à Ancône dans la Drôme, il jongle depuis plus de 30 ans entre son métier de producteur de semences potagères en agriculture biologique et sa passion pour la sculpture. À 63 ans, outils en main, il ne cesse d'inventer, de créer. De ses doigts jaillissent des pièces uniques. En autodidacte, il a appris à tailler et assembler des objets mis au rebut : vieilles souches en bois, anciens outils en métal, verre de récupération. « Je leur apporte une nouvelle germination, une étincelle de lumière. »
Poète dans l'âme
C'est suite à des blessures personnelles que Bernard Froment s'est tourné vers le monde de la sculpture abstraite. « À cette période-là, j'écrivais déjà quelques poèmes dans mon tracteur. De la poésie sur ma condition de paysan, sur ma vie. J'ai eu besoin de matérialiser ces mots, de les mettre en lumière. L'art m'a réellement soutenu et aidé dans ces moments difficiles. » D'abord ce fut quelques œuvres par-ci par-là, puis de plus en plus. Aujourd'hui, à l'heure de la retraite, il avoue que l'art a pris le dessus. « Je suis désormais plus souvent dans mon atelier que dans mes champs ». Son atelier, c'est son antre. « Dans ce brouhaha, je trouve la liberté, le silence et le travail raffiné. »
« L'art est notre nourriture spirituelle »
Il y accumule bouts de bois usés, disques de déchaumeur, morceaux de verre abimés... jusqu'au jour où ses éléments seront assemblés au gré de ses intuitions, pour, en quelque sorte « redonner vie au monde paysan ». « Mes pièces sont faites de fragilités et d'histoires anciennes, prévient-il. Tous ses vieux matériaux de récupération, je les prépare comme pour un jour de fête, je les redresse, leur offre une nouvelle base, une nouvelle vie. » Exposées dans son atelier-galerie à Ancône, la plupart de ses œuvres sont toutes imposantes, de 1 à 2 mètres de haut. Elles ont toutes nécessité de nombreuses heures de travail et de patience. « Je les aime toutes », indique le sculpteur qui a même du mal parfois à s'en séparer pour des ventes.