«Je me souviens très bien du jour où notre premier petit garçon est arrivé à la maison. C’était le 23 décembre 2003. Quel beau cadeau en cette veille de Noël ! Nous venions de passer dix jours avec lui au Burkina Faso, où la température dépassait 35°C. Quand nous avons atterri en France, il faisait très froid.
Samuel, deux ans, a vécu un tel bouleversement du fait du contraste entre nos deux mondes, qu’il était ébahi devant tout. Dans la cour de la ferme, le bruit du tracteur l’a énormément surpris. Il n’avait jamais entendu de moteur… Un matin, lorsque nous étions en train de traire les vaches, il a traversé la cour, en grenouillère, avec ses bottes sous le bras ! Il pensait qu’avec son pyjama, il aurait les pieds protégés. Il avait de la boue partout !
Samuel a été émerveillé par les vaches, pas apeuré. Il avait côtoyé des animaux dans l’orphelinat, qui était situé en brousse. Néanmoins, les Africains n’ont pas la même approche que nous avec les bêtes. Ils ne les touchent pas, ne leur portent pas d’affection. Encore aujourd’hui, à quinze ans, notre fils n’a pas de lien particulier avec nos vaches laitières.
Enfant noir à la campagne
À l’époque, il n’était pas courant de voir un enfant noir en milieu rural. Samuel était le premier de son école. Nous appréhendions un peu les réactions de nos voisins, car le vote extrême droite est bien présent dans nos villages. Mais certains nous ont dit : « Une vie sans enfants, ce n’est pas une vie ! » Cela fait chaud au cœur… Depuis dix ans, d’autres familles noires se sont installées à la campagne, les choses ont évolué. Mais dans la ruralité profonde, la différence continue à faire peur. Voir une personne noire conduire un tracteur reste toujours aussi rare !
Puis, nous avons accueilli Simon, également burkinabé et Sarah, une Haïtienne. L’association Lumière des enfants, qui nous a accompagnés tout au long de l’adoption, nous avait conseillé de les impliquer dans des associations pour favoriser leur intégration. Samuel et Simon jouent de la musique dans la société musicale et Sarah pratique la danse. Nos trois enfants semblent épanouis, nous formons une vraie famille ! »