Connu comme le loup blanc dans le milieu des collectionneurs de tomates, Pascal Antigny est apprécié par les hybrideurs pour sa grande discrétion. Depuis 1985, plus de 4 000 variétés sont passées entre ses mains. À Quierzy (Aisne), l’éleveur cultive ce fruit star dans quatre tunnels. Les plants alignés, tuteurés et étiquetés montrent la méticulosité de l’homme de 65 ans.

Plus de 4 000 variétés

Son entichement pour la tomate est né de la rencontre d’une femme. « En 1985, alors que je travaillais dans la police à Paris, je vivais une histoire d’amour avec une collègue de l’ambassade de France à Moscou. Lors d’un de ses voyages elle m’a rapporté trois graines », explique le retraité. Système soviétique oblige, la jeune femme plaça les semences dans son soutien-gorge pour passer la douane. « Sur les trois, deux ont germé et produit des fruits de 1,280 kg. C’est là que j’ai commencé ma collection. L’année suivante, je cultivais 52 variétés, l’année d’après 365. Et depuis je n’arrête pas. »

Pascal a un faible pour les tomates anciennes qui ont du goût. « Au début, j’achetais tout, mais maintenant je suis connu des hybrideurs qui me confient leurs semences, souligne-t-il. La tomate, c’est comme un bébé, c’est facile à faire, mais c’est difficile à élever. J’estime qu’une variété est stable en F7. L’an dernier, l’une a lâché entre mes doigts en F5. J’aime développer, car les surprises sont parfois phénoménales. »

Graines accessibles au grand public

Les sélectionneurs américains chérissent son travail dans l’ombre. « Il ne faut pas qu’il y ait de fuite », souligne l’ancien de la brigade criminelle. Une intrusion l’a amené à clore son­ jardin et installer des caméras infrarouges. « Il y a des pourris partout », constate-t-il. En 2014, Pascal a créé avec cinq autres passionnés l’association Cultive ta rue (1). Celle-ci permet au grand public d’avoir accès à plus de 1 500 variétés de graines. « L’achat d’un abri de 25 m coûte cher. Un jour, mon épouse m’a dit : “Tu aurais pu t’acheter une Ferrari rouge comme la tomate avec l’argent dépensé”. » Désormais, l’association supporte les coûts et revend les semences cultivées gracieusement par Pascal.

Le collectionneur, conférencier à ses heures, expose à de nombreuses fêtes de la tomate. Comme dans son ancien métier, Pascal recherche toujours. Des cultivars, plus des criminels ! Pas surprenant qu’il ne dorme que trois heures par nuit. L’investigation, c’est sa vie. Catherine Yverneau

(1) https://cultivetarue.fr/