Le jeune couple a un parcours peu ordinaire. Antoine Bressac a toujours voulu être agriculteur, même si ses parents ne le sont pas. Mais il était indécis sur la filière à choisir. Quant à Myriam Brideron, fille d’agriculteurs de l’Yonne, elle souhaitait travailler en élevage porcin, mais pas forcément comme éleveuse. C’est à Villefranche-de-Rouergue, dans l’Aveyron, que les deux jeunes se rencontrent. Antoine suit une spécialisation en bovin viande, Myriam en porc, après avoir travaillé à l’ITP (1). Antoine part ensuite six mois en stage en Australie. À son retour, il assure des remplacements dans plusieurs exploitations pour découvrir différentes facettes du métier. Alors qu’il est chauffeur pour la Cuma Lot Environnement, il fait connaissance de Marie-Christine et Jean-Noël Lagorse, propriétaires d’une ferme porcine à Girac. En 2007, Myriam devient salariée de l’exploitation, puis Antoine la remplace, lors de ses deux premiers congés de maternité. Tous deux comprennent alors que devenir naisseurs-engraisseurs de porcs est dans leurs cordes.

Faire aussi bien qu’avant

Antoine et Myriam connaissent donc bien l’exploitation lorsque les Lagorse décident de la transmettre, quelques années avant de prendre leur retraite. Ils veulent que leur ferme continue à vivre à tout prix. Pour le jeune couple, qui souhaite s’installer et travailler ensemble, l’occasion est parfaite. En 2012, Antoine et Myriam montent un dossier d’installation et parviennent, un an et demi après, à reprendre l’élevage. Chose peu commune, comme Marie-Christine et Jean-Noël n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite, les nouveaux installés leur proposent d’inverser les rôles et de les embaucher comme salariés. Cela facilitera, du même coup, la transmission du savoir-faire. Après une séance de médiation avec un intervenant extérieur, afin de s’assurer que les deux couples peuvent travailler ensemble, l’affaire est conclue. Les Lagorse consentent même un crédit-vendeur aux acheteurs pour une partie du prix de la ferme, remboursable en treize ans.

« Notre idée était de reprendre l’exploitation telle quelle et d’essayer de faire aussi bien, raconte le jeune couple. L’élevage, qui compte 1 200 places d’engraissement, est très bien conçu. Nous élevons quatre bandes de 40 truies et 20 cochettes, et engraissons 4 200 porcs charcutiers par an. Nous vendons aussi quelques porcelets si nous en avons trop. L’aliment est fabriqué à la ferme, à partir du maïs et des céréales que nous cultivons et que nous achetons à nos voisins. Comme échange de bons procédés, nous pouvons assurer l’épandage de notre lisier sur leurs terres, par le biais de la Cuma Lot Environnement, et certains nous réservent leurs récoltes. »

Antoine, Myriam et leurs trois enfants habitent à 17 km du site, ce qui leur permet de séparer leur vie de famille et leur travail. Sur l’exploitation, tous les bâtiments sont sous alarme, qui prévient si le système d’aération, le chauffage, la brumisation ou le distributeur d’aliment dysfonctionnent.

Bien que polyvalents, ils se répartissent les tâches. Myriam s’occupe plutôt des truies et des mises bas, et Antoine du post-sevrage, de la fabrication de l’aliment, des cultures et des inséminations artificielles. Les porcelets sont sevrés à vingt-huit jours, puis gardés sept semaines en post-sevrage et engraissés pendant trois mois. Ils sont vendus à cent quatre-vingts jours, à 95 kg. La ferme livre, toutes les cinq semaines, 420 porcs sous cahier des charges IGP Jambon de Bayonne au groupement Païso, rattaché à la Capel. Ils leur sont payés au prix du cadran. Une prime IGP peut s’ajouter quand le cours est bas. Depuis l’année dernière, le rapport entre le prix du porc et celui des céréales pour l’aliment est intéressant pour les éleveurs.

Enfin, dans cinq ans, le couple récoltera les premières noisettes d’un verger de 8 hectares qu’il vient de planter autour des bâtiments d’élevage. « On aime bien les arbres, ajoutent Antoine et Myriam. Ce verger habille avantageusement le pourtour de l’exploitation et la récolte des noisettes se fera à une période où nous n’avons pas de travaux aux champs. Ce complément d’activité nous conforte aussi dans l’idée d’embaucher à terme un salarié. »

(1) Institut technique de la filière porcine.