Jean-Claude Ferrot habite en pleine campagne gersoise, au milieu des collines. Pour travailler ses champs, le cultivateur doit monter à pied des pans inclinés et conduire des engins agricoles puissants. Mais depuis ce jour de 2013 où sa moissonneuse lui a broyé le pied droit, obligeant le chirurgien de l’hôpital à l’amputer sous le genou, il se bat pour avoir droit à une prothèse adaptée à son activité et essayer de retrouver une vie « normale ». « En janvier 2014, un médecin spécialisé en rééducation fonctionnelle m’a prescrit une prothèse de pied Kinterra, qui devait me permettre de reprendre le travail rapidement, raconte-t-il. Il s’agit d’un appareillage hydraulique articulé à restitution d’énergie, conçu pour sols accidentés. Il permet de conduire des poids lourds, voire de sauter lorsqu’on descend d’une machine. Mais comme il ne faisait pas partie de la liste des produits et prestations (LPP) remboursables par la MSA, celle-ci a refusé de le prendre en charge. » « Nous avons estimé qu’une prothèse traditionnelle, inscrite sur la LPP, pouvait convenir », confirme le médecin-conseil chef de la caisse de Midi-Pyrénées sud. Le pied choisi par le spécialiste aurait coûté 3 400 € de plus.
Le céréalier conteste la décision devant la commission de recours amiable de la MSA qui rejette sa demande. Il saisit alors le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) du Gers qui, en septembre 2015, somme la MSA de prendre en charge la prothèse Kinterra et l’habillage de prothèse Aqualeg (résistant aux acides), adaptés au handicap de l’agriculteur. Mais la MSA fait appel et Jean-Claude retourne devant le tribunal d’Agen (Lot-et-Garonne) en octobre 2016. La cour d’appel demande l’expertise d’un autre médecin spécialisé, qui tranche définitivement en faveur de Jean-Claude. Cette fois, la MSA jette l’éponge. Elle n’ira pas en cassation. Mais la décision de justice, qui oblige un organisme de prise en charge à financer un appareillage hors nomenclature, pourrait désormais avoir d’importantes conséquences dans la gestion de cas similaires.
Des moments de grande déprime
Dans son rapport, l’expert note aussi que la MSA a « laissé dériver le dossier », ce qui a « augmenté le syndrome anxiodépressif » de l’agriculteur. « Ça a été très dur, j’ai eu l’impression d’être harcelé et de mourir à petit feu, reconnaît Jean-Claude. À cause du manquement de la MSA, mon assurance et ma banque ont été bloquées et elles n’ont pas pu se positionner. J’ai dû revendre des machines agricoles et mes véhicules professionnels, et je me suis moi-même acheté une prothèse provisoire Kinterra à 6 200 €. Heureusement, en novembre, le TASS a reconnu que mon taux d’incapacité permanente partielle était à plus de 80 %, ce qui va m’aider pour la suite des démarches. » L’agriculteur espère aujourd’hui un règlement rapide de son dossier par les autres organismes concernés.