«Il n’y a pas de blessé léger lors d’un accident avec les lignes électriques », martèle Bernard Jolivart. Cet entrepreneur de travaux agricoles, basé à Alland’Huy-et-Sausseuil, dans le sud des Ardennes, est encore marqué par l’accident survenu en 2007 dans son secteur. « Vincent Bertand, éleveur à Bouvellemont, a accroché une ligne électrique avec l’ensileuse de la Cuma. Il a perdu ses deux jambes, tandis que l’autre agriculteur venu à son secours est décédé », déplore Bernard.

L’entrepreneur a aussi connu un accident avec une ligne moyenne tension. « En pleine moisson de maïs, j’ai accroché une ligne avec la vis de vidange. Heureusement, je m’en suis rendu compte et je suis resté en cabine. » Car avec son dispositif flanc de coteaux qui corrige jusqu’à 20 % de pente, la TopLiner de Bernard atteint une hauteur de 5,80 m une fois la vis dépliée. « Les lignes sont théoriquement à 6 mètres, précise Eric Perrin, conseiller en prévention des risques professionnels à la MSA Marne Ardennes Meuse, mais avec la dilatation sous l’effet de la chaleur ou un problème sur l’installation, elles descendent plus bas. » La seule règle concernant le travail à proximité des lignes, c’est de ne pas s’approcher à moins de 3 mètres. « Une règle définie pour le BTP et inadaptée à l’agriculture », constate l’entrepreneur.

Machines trop hautes

« Auparavant, le risque électrique était lié à la formation d’un arc, commente Eric Perrin. Mais avec l’augmentation de la hauteur des machines, jusqu’à 6,34 m pour des ensileuses ou des arracheuses de betteraves, on accroche les lignes. Le risque est que le chauffeur ne se rende pas compte qu’il est entré en contact avec la ligne, comme dans le cas de Vincent Bertrand, qui est descendu de son ensileuse car il a aperçu des flammèches. Et là, c’est l’électrisation assurée. »

En sécurité pour 3 500 €

Ce risque-là, Bernard, qui intervient sur de nombreuses parcelles dites « à risque », n’en veut pas. Conseillé par Eric Perrin, il s’est équipé d’un dispositif de détection des lignes électriques. Un capteur placé sur le toit de la cabine détecte la présence du champ électromagnétique. Le capteur est calibré pour les lignes 20 000 volts, qui sont celles qui génèrent le plus d’accidents en agriculture. « Dès que je m’approche à 25 mètres d’une ligne électrique, un signal sonore m’avertit en cabine, explique Bernard. Je peux alors prendre les mesures nécessaires comme fermer la trémie ou replier la vis. Ensuite, j’appuie sur un bouton pour valider le fait que j’ai pris conscience du problème. Cela évite d’avoir le signal sonore en permanence. Le dispositif s’active automatiquement dès que la moissonneuse travaille, il n’y a aucune action particulière à faire pour bénéficier de cette protection. »

Le système a été calibré en fonction des observations de l’entrepreneur. Il coûte 3 500 euros mais peut être subventionné à 50 % par la MSA. Le dispositif de Bernard, qui a bénéficié d’un programme pilote entre 2011 et 2013, a été subventionné à 100 %. Au total, 15 boîtiers sont installés sur le secteur d’Eric Perrin, dont 13 dans les Ardennes. « Mais attention, ce n’est qu’une aide à la conduite, insiste Eric Perrin. Le détecteur ne fait pas tout, il doit être couplé à une conscience du risque. » Un risque invisible qui tue chaque année lors des chantiers de récolte.