Irriguer les pommes de terre directement dans la butte, c’est le système qu’a choisi la SCEA du Val d’essais pour économiser de l’eau tout en augmentant ses rendements. Killian Parenti, chef de culture adjoint, explique ainsi pourquoi depuis cinq ans, l’irrigation en goutte à goutte s’est imposée sur les 50 ha de pommes de terre de l’exploitation. Cette ferme, installée à côté de Châlons-en-Champagne (Marne), cultive 280 ha répartis entre betteraves, pommes de terre, blé, escourgeon et orge de printemps.
Louis Delaitre, chef d’exploitation, indique que le débit du forage de 70 m³/h de la ferme était trop juste pour irriguer correctement les 50 ha de pommes de terre avec des systèmes classiques comme des enrouleurs, d’autant plus que le débit peut baisser jusqu’à 50 m³/h en été. Le choix s’est donc porté sur un système de goutte-à-goutte, qui offre la possibilité de répartir l’eau équitablement sur toute la surface sans avoir besoin d’un gros débit. Le choix de cette solution a également été motivé par le fait que le corps de ferme et l’exploitation principale sont éloignés géographiquement. Il fallait donc un système autonome et contrôlable à distance.
Une étude hydrologique préalable
Killian explique que tous les ans, l’exploitation commande une étude hydrographique des parcelles sur lesquelles seront implantées des pommes de terre. De cette étude, découlent de nombreux choix agronomiques, le premier étant le sens dans lequel la parcelle va être travaillée et donc celui des buttes qui vont abriter les pommes de terre.
« Par exemple, sur une parcelle que nous travaillons habituellement dans un sens, l’implantation du réseau de goutte-à-goutte et l’étude préliminaire, vont peut-être imposer de la travailler dans un autre sens. Une étude topographique fait également partie des études préalables. C’est elle qui va déterminer le type de gaine qui va être implanté en fonction du dénivelé. Le choix de la gaine est primordial, car les goutteurs doivent délivrer la même quantité d’eau quelle que soit leur position dans le champ. Une fois toutes ces études effectuées, nous plantons les pommes de terre. Il ne nous reste alors plus qu’à installer le réseau de goutte-à-goutte », indique le chef de culture adjoint.
Un temps installation
L’implantation du réseau est réalisée une ou deux semaines au maximum après la plantation. Mais avant la pose des tuyaux, un coup de déchaumeur est passé à la perpendiculaire des buttes afin d’aplanir la bande où les tuyaux d’alimentation et les raccords vont être posés.
« Nous n’avons pas beaucoup de temps, car il faut éviter que les plants commencent à germer. De plus, nous ne pouvons pas enterrer la gaine au moment de la plantation, car ça freinerait trop le débit de chantier. Les premiers tuyaux à être installés sont ceux qui servent au goutte-à-goutte en tant que tel. Ces derniers sont munis de goutteurs répartis tous les 40 cm délivrant jusqu’à 0,7 litre d’eau par heure. Ces gaines sont mises dans les buttes au-dessus des plants. Elles sont enterrées à environ 3 cm à l’aide d’un buttoir à 4 rangs GH 4 de marque Grimme, qui a été adapté pour cette application. »
La pose des tuyaux prend entre six et sept jours en comptant une moyenne de 8 h de travail par jour, avec une vitesse de pose d’environ 8 km/h. Les passages de pulvérisateur sont faits en dernier car là, seules deux buttes sont irriguées. Des bouchons sont installés à l’endroit des passages de roues. Ensuite, le temps de raccordement prend environ cinq jours à deux personnes, en prenant en compte la programmation des vannes via Bluetooth. Enfin, une ou deux semaines sont nécessaires pour détecter et colmater toutes les fuites après l’installation.
Une gestion à distance
« Cette année, nous avons la chance que les 50 ha de pommes de terre soient implantés sur une seule parcelle. Cette dernière est divisée en 16 zones qui sont irriguées tour à tour, avec 2h30 d’irrigation en moyenne par secteur sur une rotation. La rotation prend 2,5 jours pour que la parcelle soit totalement irriguée. Ça nous donne une moyenne de 5 mm d’eau par zone par rotation pour une moyenne de 12 mm par semaine. »
Lorsqu’ils le souhaitent Killian ou Louis peuvent faire varier la quantité d’eau apportée. Pour ce faire, ils n’ont qu’à actionner à distance la vanne principale de la pompe pour jouer sur la fréquence et la durée d’irrigation. Ce système, en plus de présenter l’avantage d’être géré à distance, est couplé à une sonde qui contrôle l’humidité pour la garder à la profondeur du système racinaire de la pomme de terre. Le goutte-à-goutte dans la butte sert aussi à limiter le ruissellement et l’évaporation. De plus, 100 % de l’eau est disponible pour la culture. Louis précise par ailleurs que le goutte-à-goutte évite la projection d’eau sur les feuilles et ainsi la pression des maladies liées à l’humidité.