L’essai Aromam (1), présenté à l’édition 2020 des Rencontres autour des recherches sur les ruminants (3R), s’est penché sur l’efficacité d’un mélange d’huiles essentielles (2) pour le soin des mammites cliniques de sévérité faible à modérée. Cela « s’inscrit dans le cadre du plan national Écoantibio et de la démarche de responsabilité sociétale de l’interprofession laitière (Cniel) », note Nadine Ballot, du Cniel, au cours d’une conférence organisée lors du dernier Space en 2021.
Dans l’essai, 41 élevages laitiers, adhérents au contrôle de performance et avec une situation cellulaire saine, ont été recrutés. Les éleveurs ont été formés par leur vétérinaire à la réalisation des prélèvements aseptiques de lait et à l’application des huiles essentielles.
Quelques aggravations
Entre juin 2018 et avril 2020, 131 cas de mammites cliniques peu sévères ont été suivis dans ces élevages, « sur le plan clinique (aspect du lait et de la mamelle), des comptages cellulaires individuels (CCI) et des résultats bactériologiques », précise Marlène Guiadeur, de l’Institut de l’élevage. Ils répondent aux critères suivant : un unique quartier atteint, pas d’épisode similaire récent ni de CCI supérieurs à 300 000 lors des deux derniers contrôles.
Au total, 71 de ces cas ont été traités par aromathérapie (lot HE) : « 5 ml du mélange d’huiles essentielles ont été appliqués avec port de gants en fin de traite et pendant 14 traites consécutives en massage sur le quartier atteint », explique la publication scientifique. Les autres cas (lot ATB) « ont reçu le traitement antibiotique de première intention défini dans le protocole de soin » des élevages. En cas d’aggravation des signes cliniques deux à cinq jours après l’occurrence, peu importe le lot, un antibiotique de seconde intention était administré.
Un quart des cas traités avec les huiles essentielles ont reçu ce traitement supplémentaire, contre 8 % dans le lot ATB. « Si l’on voit l’administration d’un antibiotique de seconde intention comme un échec, dans le lot HE, cela peut sembler préoccupant, reconnaît Loïc Jouët, de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV). Mais il faut regarder les résultats dans leur ensemble, et suivre les taux de guérison obtenus après le second traitement. »
Jouer la complémentarité
Les trois quarts des aggravations observées dans le lot HE se sont finalement soldées par une guérison dite cellulaire (obtention de deux CCI consécutifs inférieurs à 300 000 après déclaration de la maladie). Seuls 8 de ces cas aggravés ont fait l’objet d’une analyse bactériologique et dans 7 cas sur 8, une guérison a été observée (absence du pathogène identifié dans le prélèvement de lait initial vingt-huit jours plus tard).
Ainsi, en considérant les huiles essentielles comme une solution de première intention avec la possibilité d’utiliser un antibiotique en cas d’échec, « le taux de guérison est très bon dans le lot HE, souligne Loïc Jouët. Il ne faut pas opposer ces deux traitements mais bien les considérer comme complémentaires ».
Hors aggravations, 83 % des cas traités par aromathérapie ne présentaient plus de signes cliniques dans les vingt-huit jours suivant l’occurrence, versus 91 % dans le lot ATB.
Alexandra Courty
(1) Partenariat entre l’Idele, le Cniel, l’Iteipmai, la Fevec et la SNGTV.
(2) Huiles essentielles de manuka, de palmarosa, de litsée citronnée et d’origan d’Espagne en dilution dans de l’huile de pépin de raisin.