Sur les dix foyers de tuberculose bovine détectés lors de la prophylaxie 2016 en Côte-d’Or, 70 % étaient des recontaminations. Dans la zone allaitante de l’Auxois, des double ou triple recontaminations d’élevage ne sont pas rares. Certains éleveurs ont même dû reconstruire quatre fois leur troupeau. Légitimes, la souffrance et l’exaspération des éleveurs sont palpables.
Pour un protocole national unique
Au regard de cette situation, la Confédération paysanne de la Côte-d’Or appuyée par ses représentants nationaux, estime que la politique d’abattage total a touché ses limites. « Trop d’animaux sont tués inutilement, déploraient Emilie Jeannin et Denis Perreau lors d’une conférence de presse organisée à Dampierre-en-Montagne le 31 mars 2017. L’abattage partiel doit devenir la règle. Il faut en finir avec les menaces et intimidations faites à l’encontre de certains éleveurs. »
Lors d’une rencontre avec le directeur adjoint de la DGAL (1), le 30 mars 2017 à Paris, les représentants du syndicat ont plaidé pour l’application d’un protocole national unique. « Le dispositif appliqué en Côte-d’Or est le plus strict de France, soulignent-ils. Au titre des mesures de biosécurité, le préfet exige la pose de doubles clôtures, aux frais de l’agriculteur, quand la présence d’une haie est jugée suffisante en Dordogne. Une pression particulièrement forte pèse sur le département pour que la France garde sa qualification « indemne de tuberculose », indispensable à l’exportation de ses animaux. »
La Confédération paysanne dénonce également la mainmise de la DGAL sur les tarifs d’indemnisation des bovins abattus et la fiabilité insuffisante des tests utilisés (IDC et Interféron).
La faune sauvage impliquée
« Les recontaminations d’élevage sont une catastrophe, souligne Pascal Martens, le président du GDS, aux premières loges dans la lutte contre la maladie. Outre les recontaminations de bovins à bovins, la faune sauvage [blaireaux, sangliers et cervidés] et la persistance de mycobactéries dans les zones humides et certains coteaux, en sont la cause. Quinze années de lutte intense ont permis de réduire fortement le nombre de foyers. De 45 en 2010, nous en sommes à 5 alors que la prophylaxie de 2017 est faite à 85 %. »
« Le nombre de communes soumises à une prophylaxie annuelle (3) est tombé de 346 à 285 ces deux dernières années, poursuit-il. Grâce à l’utilisation des tests à l’Interféron gamma, les abattages diagnostiques ont pu être réduits : 250 en 2016 contre un millier en 2011. On tue encore trop d’animaux, mais que faire ? Nous travaillons avec les tests qui sont disponibles et les moyens que nous avons dû en partie aller chercher nous-mêmes. »
« Pas le droit au laxisme »
« Après trois ans de travail, nous avons ainsi décroché en 2009 une dérogation nationale pour mettre en place l’abattage partiel, rappelle Pascal Martens. Il en a été de même pour l’utilisation de l’Interféron gamma, la création d’une cellule scientifique d’épidémiologie et le travail de recherche sur les mycobactéries dans le sol engagé par l’Inra. Nous sommes surveillés de près par la DGAL. Nous n’avons pas le droit au laxisme. »
Au GDS, on regrette les six années perdues à convaincre l’Administration du rôle de la faune sauvage dans la recontamination des cheptels. « Personne ne nous écoutait, se souvient Pascal Martens. Si nous avions pu appliquer, comme le font aujourd’hui certains départements, notre protocole actuel dès la résurgence de la maladie en 2002, nous n’en serions pas là. Dans le contexte difficile qui a été le nôtre, il faut mesurer le chemin parcouru, ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain et poursuivre le travail engagé, malgré les souffrances et les difficultés. »
(1) DGAL : Direction générale de l’alimentation.
(2) GDS : Groupement de défense sanitaire.
(3) Après 12 ans de prophylaxie annuelle sur l’ensemble des 150 000 bovins du département, une partie des communes ont adopté un rythme bisannuel.