Sur le piémont pyrénéen, à Estirac, la famille Ducos possède, depuis quatre générations, une belle ferme aux murs de galets, typique de la vallée de l’Adour, le fleuve qui coule au bout de ses champs. Avant lui, Georges, le père, et Fernand, le grand-père de Régis, élevaient des vaches ainsi que des cochons, et cultivaient 28 ha. « Petit à petit, l’élevage n’a plus marché et ils ont vendu leurs bêtes, raconte ce dernier. Moi, j’ai toujours voulu être agriculteur, depuis tout jeune. Je me suis installé en 1986, à l’âge de 21 ans. Comme on avait peu de terre et qu’on ne pouvait pas s’agrandir, j’ai créé l’entreprise de travaux agricoles (ETA) Ducos et Fils, en 1991, pour compléter l’activité. »

Aujourd’hui, le paysage agricole a bien changé autour de la ferme. Beaucoup d’exploitants partant à la retraite sans avoir de repreneurs, les terres se libèrent. L’agriculteur a repris 76 ha en fermage et a diversifié ses cultures.

Une planification serrée

En 2013, c’est Cyril, le fils de Régis, qui, dès la sortie de son bac pro agricole, a rejoint l’ETA. « J’ai créé mon exploitation deux ans après, lorsque j’ai pu reprendre 7 ha de terres qui n’étaient plus cultivées, détaille le jeune homme. J’ai commencé par produire du maïs. Ensuite, chaque année j’ai racheté ou loué de nouvelles parcelles : 60 ha en 2019, 3 ha en 2020… Si bien qu’actuellement, je possède 70 ha et j’en loue 40. »

 

Le matériel de l’ETA vient de chez un concessionnaire New Holland voisin où Cyril travaille quatre mois, chaque hiver, comme mécanicien. © Florence Jacquemoud
Le matériel de l’ETA vient de chez un concessionnaire New Holland voisin où Cyril travaille quatre mois, chaque hiver, comme mécanicien. © Florence Jacquemoud

En 2020, Régis et Cyril ont décidé de créer ensemble une société, l’EARL de la Bigorre, pour regrouper leurs propriétés, afin de réduire et partager les coûts administratifs. La nouvelle entité couvre désormais 218 ha, entièrement irrigables, dont la moitié est conduite en semis direct. Dès lors, pour parvenir à organiser les chantiers sur la ferme et chez les clients de l’ETA, qui se situent dans un rayon de 25 km, entre Termes-d’Armagnac (Gers) et Pouyastruc (Hautes-Pyrénées), les deux exploitants ne définissent leur assolement qu’après avoir pris connaissance de ceux des autres agriculteurs. « Nous jonglons surtout pour l’utilisation de la batteuse, précise Cyril. Pour la récolte du maïs, il n’est pas rare que je travaille le jour pour l’entreprise et que je récolte nos propres champs la nuit. »

Régis et Cyril décident également des espèces qu’ils vont semer en fonction des prix pratiqués sur le marché. Leur principale production reste le maïs conso, autour de 100 ha, qu’ils livrent directement à la coopérative Vivadour. Mais ils cultivent aussi, depuis peu, du maïs doux pour Soléal-Bonduelle, qui possède deux usines dans les Landes et qui veut augmenter sa production de 30 %. Le maïs pop-corn fait également partie de leurs options, cependant, il est plus compliqué à gérer car vendu directement à la société Nataïs, à Bézéril (Gers), spécialiste européen de la filière. À cela s’ajoutent, selon les années, orge et colza semences, colza, blés améliorants, tournesol…

Les 22 ha de soja semence vont permettre de développer la filière 100 % Sud-Ouest portée par Maïsadour et Vivadour. © Florence Jacquemoud
Les 22 ha de soja semence vont permettre de développer la filière 100 % Sud-Ouest portée par Maïsadour et Vivadour. © Florence Jacquemoud

 

Soja semence et conso

Depuis quatre ans, les Ducos ont aussi inclus dans leur rotation une cinquantaine d’hectares de soja, une légumineuse qui demande peu d’engrais et dont le prix est généralement rémunérateur. En 2020, ils ont semé 22 ha de soja semence, qu’ils espèrent valoriser autour de 550 €/t, 17 ha de soja destiné aux usines d’aliment pour bétail et 9 ha pour l’alimentation humaine. L’annonce de la création d’un site de trituration dans les Landes (lire l’encadré) et du lancement d’une filière soja du Sud-Ouest les motivent pour développer cette production. Mais Cyril prévient : « Si les surfaces augmentent beaucoup, chez nous et chez nos clients, nous risquons d’avoir de la peine à trouver une fenêtre sans pluie pour récolter en octobre. »

Certaines années compliquées, les deux exploitants confient entièrement la commercialisation de leur production à Vivadour. D’autres années, ils vendent eux-mêmes au prix choisi, suivant les cotations Euronext. « Cela exige beaucoup de secrétariat pour tout suivre, regrette Régis. Cette année, nous pensons obtenir de bons revenus, grâce au prix élevé des céréales. Mais on entend dire que les intrants vont augmenter. Espérons que ce que nous gagnerons d’un côté ne sera pas repris de l’autre. »

Florence Jacquemoud