Comme annoncé par le Premier ministre, Michel Barnier, et en se fondant sur l’article 50-1 de la Constitution, l’Assemblée nationale a été consultée le 26 novembre 2024 sur le thème du traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Les parlementaires ont ainsi été appelés à exprimer, ou non, leur soutien au gouvernement français dans son opposition au projet d’accord de libre-échange tel qu’il est envisagé par la Commission européenne.
Après les débats, le vote, symboliques, des députés a été sans appel avec 484 voix en faveur du texte et 70 contre la position du gouvernement dans ces négociations. Ces 70 députés comptent l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne qui a expliqué s’être trompée au moment du vote, mais surtout 69 membres d’un seul groupe, la France Insoumise (LFI).
Le gouvernement officialise son désaccord
En préambule des débats, la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, s’était exprimée dans l’Hémicycle pour argumenter la position du gouvernement.
« L’accord tel que la Commission l’envisagerait n’est pas acceptable et le gouvernement français et le président de la République s’y opposent donc pleinement, résolument », a-t-elle déclaré. Il s’agit d’une décision de s’opposer prise par « pragmatisme et non par dogmatisme », refusant de « continuer de donner aux agriculteurs le sentiment de n’être qu’une monnaie d’échange à l’international », a-t-elle assuré.
La ministre estime de plus que « cet accord ne nous permet pas de garantir ni la sécurité des denrées importées, ni l’établissement de concurrence loyale pour nos agriculteurs ».
La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a redit le lendemain sur France Info l’objectif d’un tel scrutin. « Ce vote donne de la puissance à la position qui est la nôtre. Il a une portée politique car c’est la voix des Français que l’on relaie », a-t-elle argumenté. Concédant toutefois que seule une minorité de blocage à l’échelle européenne sera en mesure de faire bouger les lignes.
LFI demande plus
Pour justifier l’opposition de LFI à ce texte, Aurélie Trouvé, présidente de la commission des affaires économiques, reproche notamment au gouvernement de conditionner son acceptation de l’accord, à l’addition de mesures miroirs. « Je comprends donc que vous pourriez trouver cet accord acceptable. Pour ma part, je ne crois pas qu’il y ait de mesures miroirs qui permettent un bon accord de libre-échange », explique-t-elle. Et plutôt que le vote de ce texte « j’appelle la Représentation nationale à prendre une position claire contre cet accord, et pas contre l’accord tel que la Commission européenne l’envisage, a-t-elle insisté. Pour l’industrie comme pour l’agriculture, l’urgence est de revenir à la protection commerciale ».
André Chassaigne, député du Groupe Gauche démocrate et républicaine, très offensif sur l’accord, a tenu à s’adresser directement aux producteurs. « Aux nombreux agriculteurs et éleveurs, qui suivent nos débats et s’insurgent, à juste raison, contre cet accord : les concurrences déloyales, l’ajustement sur les prix et les marchés mondiaux sont les fruits d’un capitalisme mortifère, supposé bienfaiteur de l’humanité ! » a-t-il lancé. « Cet accord est une imposture agricole et alimentaire qui méprise nos agriculteurs et nos éleveurs. Il vide le sens même de leur travail, puisque sa seule justification est un troc avantageux pour d’autres secteurs, comme celui de l’automobile », a-t-il ajouté. Autre député opposé de la première heure, Paul Molac du groupe Liot, a lui aussi redit les bases de son désaccord. « Comment expliquer à nos agriculteurs ou à nos consommateurs que des produits sud-américains seront importés et commercialisés avec des normes sanitaires, sociales et environnementales bien inférieures à celles appliquées sur nos territoires ? » s’est-il interrogé.