Au fil des saisons, une centaine d’hectares situés au sud du Cambrésis (Nord) voient sortir de terre des légumes variés et issus de l’agriculture bio. À la tête de cette dynamique : une poignée d’exploitants, qui ont décidé de mutualiser leurs compétences, matériels et main-d’œuvre. Le groupement d’employeurs « Des saisonniers des champs » a été créé en 2016.

Vingt kilomètres maximum

Cent trente six personnes ont été recrutées au sein de cette structure depuis le début de l’année 2019. Leurs contrats durent de quelques semaines à plusieurs mois. « Celles que nous embauchons habitent au maximum à une vingtaine de kilomètres de nos exploitations », explique Véronique Cany, agricultrice et présidente de la structure. « Notre territoire connaît un taux de chômage élevé. Il était important pour nous de recruter de la main-d’œuvre locale et d’apporter une dimension sociale à notre projet. »

Les saisonniers font majoritairement du désherbage de parcelles. Un emploi physique et répétitif, qui attire un large panel de profils : 30 % des employés sont étudiants ou lycéens, 25 % n’ont ni travail, ni droit au chômage. Leur taux de fidélisation a tendance à augmenter. En 2018, 25 % d’entre eux avaient déjà œuvré pour le groupement. Ils représentent plus d’un tiers des personnes embauchées en 2019.

Montée en compétences

Pour fidéliser la main-d’œuvre, la structure propose beaucoup d’heures de travail, grâce à la diversité de ses vingt-six exploitations bio et conventionnelles adhérentes. Onze mille heures ont été réalisées, cette année, au mois de juillet.

« La main-d’œuvre locale que nous captons nous permet d’envisager de nouvelles productions dans nos rotations, dont la culture s’étale quasiment sur toute l’année. Certains saisonniers sont désormais employés en CDI, d’autres deviennent chefs d’équipe »,relate Véronique Cany.Les nouveaux sont embauchés pour faire du désherbage. Ils peuvent ensuite être amenés à bâcher, récolter les parcelles et, depuis 2018, conditionner les légumes.

Cette diversification des tâches leur plaît. Olivier, en reconversion professionnelle, est salarié du groupement depuis le mois de mai dernier. « Le travail est varié. Je ne ressens pas de lassitude et l’ambiance est chaleureuse. Je suis prêt à revenir l’an prochain. »

Covoiturage et convivialité

Le groupement cultive cette convivialité et souhaite créer de la solidarité entre le personnel. En 2019, plus de la moitié ne dispose pas de véhicule. Un système de covoiturage par équipe existe. « La coopération commence avant même que les salariés ne soient sur leur lieu de travail. Nous avons aussi mis en place un groupe fermé sur Facebook. Toutes les informations relatives aux équipes et aux exploitations sont relayées. Le programme de la semaine à venir est mis en ligne avant le week-end. Les saisonniers peuvent échanger entre eux et avec nous », poursuit Véronique Cany, qui s’attache à faire le point régulièrement avec eux, directement ou par le biais des chefs d’équipe. « Si quelque chose ne va pas, on crève l’abcès. »

Les membres de la structure sont convaincus que les employés sont davantage motivés s’ils ont le sentiment qu’on leur porte de l’intérêt, en échangeant avec eux ou en se souciant de leur bien-être au travail. « Nous leur proposons de faire des séances d’étirement et nous nous sommes dotés de toilettes sèches mobiles, qu’on place au bout des champs. Nous avons eu des retours positifs à la suite de cette initiative. »

Si la mise en place de ces dispositifs demande du temps, elle est bénéfique sur le long terme. La relation avec le personnel temporaire ne s’arrête pas lorsque la saison est finie. « Nous leur offrons à tous un panier de légumes bio au moment des fêtes de fin d’année. C’est l’occasion de les revoir et de leur rappeler que les recrutements pour l’année suivante commenceront trois mois plus tard. » Bertille Quantinet