«Nous sommes quasiment les seuls éleveurs du Haut-Rhin à proposer de la vente au détail de produits issus de la vosgienne, race laitière emblématique du massif dont elle tire son nom. Nous l’élevons, la transformons et la commercialisons », résument Claude Rasser, Florine et Raphaël Barowsky, les trois associés de l’EARL Zum Burahisla (« la maison paysanne » en alsacien) à Ungersheim, au nord de Mulhouse. Installé en 1991 sur la ferme familiale laitière située au centre de la commune, Claude Rasser commence à écouler des demi-veaux ou des quarts de bœuf de races diverses en 1995, à la demande de clients insécurisés par la crise de la vache folle. Cuisinier de formation, il investit avec son épouse Christine dans du matériel de transformation et dans un local de vente. En 2000, il accueille ses premières vosgiennes. Elles prennent le pas sur les autres races dans les années 2005-2006. Elles ont accès à 20 hectares de pâtures attenantes aux bâtiments.
Bâtiment autoconstruit
« Leur caractère laitier permet de produire du veau de lait. La fibre de leur viande est fine, avec du persillé. Leur gabarit convient bien. Une carcasse de 340 kg pour un bœuf ou de 280 kg pour une génisse s’écoule bien sur une semaine dans notre magasin et cinq autres points de vente », témoigne Raphaël Barowsky. BTS de machinisme en poche, il rejoint l’exploitation en 2013, un an après Florine, fille de Claude, titulaire d’un BTSA ACSE (1). « J’ai toujours été intéressée par la ferme et la vosgienne ! », souffle la jeune femme, aujourd’hui administratrice de l’organisme de sélection de la race. Une demande croissante pour des bœufs à l’herbe finis sur 28 à 34 mois, conduit à adjoindre, en 2022, au bâtiment d’origine en bois de 30 X 32 m, une extension en tôle de 36 X 24 m en grande partie autoconstruite. L’aire paillée des vaches est couverte en 2023, les abords aménagés à l’été 2025.

« On a fini notre programme », lance le jeune couple. Raphaël et, depuis l’an passé, une salariée, sont occupés à la ferme. Claude vient en appoint sur les cultures et a la charge de la découpe avec l’aide d’un boucher. Florine confectionne lasagnes, « fleischnacka » (spécialité alsacienne à la viande) et tourtes, gère la vente et l’administratif. Sur presque tous les postes « chaque membre de l’équipe peut en épauler un autre », soulignent les associés.

Vente à flux tendu
Chaque semaine, Raphaël emmène à l’abattoir de Cernay, distant d’une quinzaine de kilomètres, un veau de lait, un bœuf ou une génisse, et un à deux porcs encore engraissés sur paille au village. En début de semaine, la priorité est de conditionner sous-vide les commandes passées par cinq autres magasins de producteurs.
D’octobre à Pâques, le point de vente de l’EARL situé au centre de la commune est ouvert de 9 heures à 18 heures chaque mercredi. L’été, l’accès est limité à une fois par mois, mais pour ce seul jour, les ventes sont « équivalentes à deux mercredis et demi » d’hiver. Les clients viennent de 25 kilomètres à la ronde, convaincus par le bouche-à-oreille, la journée portes ouvertes annuelle et les commentaires sur les réseaux sociaux. « Nous élaborons tout à la demande. Notre force, c’est la qualité de nos produits, proposés au détail. La caissette de 10 kg, ça peut arriver, mais c’est très rare. La vente se fait en flux tendu », indique Florine.

« La vente directe tourne bien. Mais l’avenir est incertain, analyse Raphaël. Nous n’allons rien gagner avec les céréales en 2025 et nous réfléchissons à en réduire la surface au profit de l’herbe, comme nous l’avons déjà fait sur 8 hectares. Le prix des consommables et des pièces de rechange explose. Les frais d’abattage ont augmenté de 7 000 € entre 2023 et 2024. Nous avons ajusté nos tarifs, mais nous ne pouvons pas nous permettre d’être 30 % plus cher que la grande distribution. Notre marge s’est érodée. »
(1) Analyse, conduite et stratégie de l’entreprise agricole.