Entre 2006 et 2016, Rémy Grange était salarié à mi-temps sur l’exploitation arboricole de ses parents, à Colombier-le-Cardinal (Ardèche), tout en étant chef d’exploitation sur un verger d’abricotiers de 10 ha dans le Gard. Après 10 ans d’allers-retours entre le Gard et l’Ardèche, il a finalement repris les rênes de l’exploitation familiale. Son installation s’est soldée par une diversification de l’offre et le développement de la vente au détail.
Maintenir une présence constante
Huit ans après son installation, la vente au détail représente environ 35 à 40 % de son chiffre d’affaires. « Elle apporte un revenu plus régulier que la vente en gros », explique Rémy. Et elle lui permet de traverser les mauvaises années, comme 2024. « Sans la vente au détail, cette saison marquée par une baisse des volumes et de gros défauts d’aspects des fruits, serait catastrophique. » Sur les marchés ou dans les magasins de producteurs, Rémy prend le temps d’expliquer à ses clients les raisons de ces défauts d’aspect.

Si cela ne tenait qu’à lui, il ne ferait plus que de la vente en direct. Mais bien qu’il ne compte pas ses heures, le temps lui manque. « Je livre déjà deux à trois fois par semaine en partant à 3 h du matin, je travaille entre 70 et 80 heures par semaine toute l’année. » Pour les marchés du samedi matin, à Lyon et Saint-Étienne, il emploie en plus des salariés. Il n’envisage sous aucun prétexte de louper un marché : la fidélité vis-à-vis de ses clients est pour lui l’une des clés de la réussite. Il assure aussi des permanences dans les deux magasins de producteurs dont il fait partie, même s’il estime que « la performance dans le magasin passe surtout par la présence des producteurs sur leur exploitation ». Aussi délègue-t-il volontiers la partie vente à des salariés qualifiés.
Sécuriser la production
Face aux aléas climatiques de plus en plus extrêmes, son principal défi aujourd’hui est de sécuriser sa production. « Je vise avant tout la protection de ma vente au détail, qui est la plus rentable », confie Rémy. Pour l’arboriculteur, l’avenir du verger est couvert, à l’abri du gel, de la grêle, de la pluie et du vent. S’il a misé un temps sur une assurance multirisque climatique, il compte l’arrêter cette année pour réorienter les investissements vers la protection de son verger. « Je dois avoir des fruits coûte que coûte pour garder mes marchés de vente. » Il regrette de ne pas avoir pris ce virage de la protection plus tôt, même avant 2016 alors qu’il n’était que salarié sur l’exploitation. « J’ai 15 ans de retard sur le sujet ! » déplore-t-il. À ce jour, seulement la moitié de son verger est couvert avec des filets anti-grêle. Cette année, il a fait les frais de l’absence de couverture de ses cerisiers et envisage dès l’année prochaine d’installer des bâches anti-pluie. Sa trésorerie lui permet pour l’instant d’investir chaque année environ 150 000 euros pour sécuriser sa production.

En 2025, il compte aussi remplacer une partie de ses abricots par des kiwis, des fruits plus rustiques, plus résistants à la grêle et qui demandent moins de traitements. Jamais à court de projets, Rémy reste à l’écoute du marché pour diversifier encore plus son offre dans le futur : « Je ne me ferme aucune porte : peut-être qu’un jour j’aurai des oliviers, des kakis, des fruits exotiques ! »