« Je voulais oeuvrer dans le milieu agricole, mais je ne pensais pas pouvoir m’installer un jour ici. » Pour Matthieu Labarthe, 32 ans, « ici » c’est l’exploitation de polyculture-élevage créée en 1972 par ses deux oncles où, adolescent, il venait parfois travailler. A l'origine, la ferme comptait un peu plus de 20 ha, dont 8 ares d’asperges. Le Gaec s’est développée au fil des années et des opportunités : l’irrigation dès la fin des années soixante-dix, le développement des volailles fermières label rouge avec Maïsadour et des asperges avec la Copadax et, dans les années 1990, l’installation d’un séchoir et d’une fabrique d’alimentation à la ferme.
La fin des oies
Les volailles ont toujours été élevées en plein air dans des cabanes mobiles dépourvues d’installation électrique. En 2010, David Labarthe, un cousin éloigné, rejoint l'exploitation qui devient une EARL. La même année, l’élevage passe en bande unique. « Cela faisait partie des recommandations sanitaires, avec l’avantage d’une cadence de travail périodique plus facile à gérer et des temps de repos appréciables », résume l’éleveur de 46 ans.
Hormis les pipettes d’abreuvement installées à partir de 2015, les installations demeurent traditionnelles. En 2016, à cause de la grippe aviaire, l’exploitation vit une transition difficile : « Sur un même site, nous pratiquions l’élevage, le gavage d’oies et nous faisions des œufs à couver, précise David. Cela ne répondait plus aux nouvelles préconisations liées à la biosécurité. »
De leur côté, les oncles souhaitent « lâcher prise » et David doit trouver un nouvel associé. Matthieu, diplômé depuis peu de l’ENSAT (École nationale supérieure agronomique de Toulouse), est tenté par cette opportunité. Il débute comme salarié en 2017, « pour voir si j’arrivais à insuffler une nouvelle dynamique à l’élevage ».

« Nous avons préféré arrêter les oies et, à leur place, réorganiser l’atelier des pintades dans un des trois bâtiments existants, poursuit-il. Les deux autres restent inutilisés. Nous avons aussi doublé la production de chapons et de poulardes sur un autre site et poursuivi celle des poulets de chair dans une pinède à 5 km à vol d’oiseau. »
Mais les oies étaient très rémunératrices : « Il a fallu du temps pour combler cette perte. Nous y sommes parvenus progressivement en améliorant nos résultats techniques. » Les deux hommes se sont associés en 2020 et ont réparti les responsabilités : Matthieu à l’élevage, David sur les 130 ha de grandes cultures (en renfort sur les volailles festives de juin à décembre), et ensemble sur les asperges.
Un équilibre éprouvé
La diversification vers le tournesol et le soja a commencé en 2015. Le tournesol est économiquement attractif sur les parcelles non irriguées. Le soja, intéressant du point de vue agronomique, n’affiche pas encore la même rentabilité que le maïs. Mais l’ouverture d’une usine de trituration à une vingtaine de kilomètres (SAS Graine d’alliance à Saint-Sever) offre un nouveau débouché avec une contractualisation des achats par leur coopérative.
Le maïs grain reste la culture dominante avec plus de la moitié autoconsommée. Les asperges sont un autre pilier important de l’exploitation et nécessitent chaque année l’embauche d’une quinzaine de saisonniers de février à la fin de mai.

Globalement, l'élevage, les grandes cultures et les asperges assurent chacun un tiers du chiffre d’affaires. Un équilibre éprouvé depuis quelques années : la grippe aviaire depuis 2016, des inondations en 2018, les cours du maïs aléatoires, le Covid qui a bloqué en partie la commercialisation des asperges... « Heureusement, à chaque fois, les bons résultats d’une production nous ont aidés à équilibrer les pertes d’une autre. Notre activité diversifiée se révèle précieuse ! »
Cette année, malgré l’explosion des charges, les rendements de 2022 en baisse et, toujours, la grippe aviaire, Matthieu et David gardent confiance, portés par des bons résultats techniques et des productions optimisées. Leur prochain objectif est d’embaucher, notamment pour pallier le départ des oncles, toujours présents en tant que salariés.
