« Les céréaliers ne comprennent pas que le discours du plus haut niveau de l’État, du président de la République comme du Premier ministre, ne soit pas suivi d’effets », a déclaré à l’AFP Eric Thirouin, président de l’Association générale des producteurs de blé et autres céréales (AGPB), le mardi 12 mars 2024 au soir.

« Je suis interpellé tous les jours par les agriculteurs sur leur envie d’en découdre à nouveau, par rapport aux incohérences entre les annonces et la réalité. Rien n’est exclu », a-t-il prévenu, jugeant que « si rien ne se passe, il paraît inévitable » que la mobilisation reprenne dans la rue.

Un vote au Parlement européen

Pour tenter de répondre à la colère des agriculteurs, Bruxelles a proposé fin janvier d’instaurer pour les produits « sensibles » (volaille, œufs et sucre), un « frein d’urgence » pour limiter le volume des importations aux niveaux moyens observés en 2022 et 2023, niveaux au-delà desquels des droits de douane seraient réimposés.

Ces mesures de restriction, déjà approuvées par les vingt-sept États membres, doivent faire l’objet d’un vote ce mercredi 13 mars 2024 au Parlement européen. Les céréaliers de l’Union européenne réclament que ces restrictions soient également appliquées aux blés, maïs et orges ukrainiens.

En France, premier producteur de céréales de l’Union européenne, les producteurs rappellent que début février, Emmanuel Macron a affirmé que ces mécanismes seraient étendus aux céréales. Ce « mécanisme de sauvegarde renforcé » va permettre une « intervention » en cas de déstabilisation des cours européens, avec des droits de douane au-delà de certains « plafonds », a indiqué le président de la République.

De son côté, Eric Thirouin déplore que rien n’ait changé depuis ces déclarations. « On a aujourd’hui un prix du blé, au départ de l’exploitation agricole, à 155 euros la tonne. Comparé à un prix de revient entre 220 et 240 euros la tonne, on voit que la perte est considérable, de l’ordre de 420 euros par hectare, soit 42 000 euros pour 100 hectares », a-t-il affirmé.

S’il juge nécessaire de maintenir une « solidarité » avec l’Ukraine en guerre et rend la Russie principalement responsable de l’effondrement des cours, il souligne que la cadence des exportations ukrainiennes vers l’Union européenne est désormais insoutenable pour les agriculteurs.

« En blé tendre, entre décembre et janvier, l’Ukraine a exporté vers l’Europe plus d’un million de tonnes. Un million de tonnes, cela correspondait avant la guerre, au quota annuel d’exportations vers l’Union européenne avant l’application de droits de douane, de 98 euros la tonne », relève-t-il.