Un milliard de milliards, c’est le nombre de microorganismes qui peuplent le rumen d'une vache laitière. Soit 100 fois plus que de cellules dans cette vache. Au sein de ce microbiote foisonnant, les bactéries sont les chevilles ouvrières de l’activité digestive du rumen. Elles dégradent les substrats et les utilisent pour leur survie. Comment caresser dans le sens du poil cette flore sensible ? C’est autour de cette question que l’Aftaa, organisme spécialisé dans les formations en alimentation animale a réunie des experts le 16 février.

« La composition chimique de la ration est le premier élément à prendre en compte pour éviter à tout prix un déséquilibre ruminal, comme l’acidose par exemple », expose Asma Zaned, enseignante-chercheuse en sciences animales à l’Inrae de Toulouse. Ainsi, intégrer une dose modérée d’aliments acidogènes comme l’amidon ou les matières grasses est essentiel. L’amidon, bien que facilement digestible, produit par fermentation de l’acide lactique qui fait baisser le pH ruminal.

« Au-delà du risque d’acidose que cela comporte, il y a de quoi perturber complètement le microbiote », alerte Asma Zaned. Les bactéries fibrolytiques — agents essentiels chargés de dégrader les fibres — ne survivent pas quand le pH baisse en dessous de 6,5. Les glucides pariétaux sont moins bien digérés et l’efficacité de la ration en est diminuée.

Fibres ou granulés ?

« Si la chimie prédomine, la composition physique de la ration est également un élément clé », poursuit Asma Zaned. « Nous avons comparé la flore ruminale obtenue en jouant sur la taille des particules de la ration. » Résultat, quand on donne des rations à base de granulés, que ce soit de la luzerne ou de l'orge (riche en amidon), on observe des communautés bactériennes plus semblables entre elles que lorsqu’on compare ration de granulés de luzerne et foin de luzerne. Pourquoi ? Ici l’aspect physique l’emporte car les fibres permettent une rumination plus longue. « La vache salive plus et cette salive agit comme un régulateur de pH dans le rumen, jouant sur la composition du microbiote et diminuant les risques d’acidose », rappelle Asma Zaned.

Des capteurs pour surveiller le rumen

Certaines technologies simples se révèlent utiles pour surveiller indirectement l’activité du rumen. Un collier équipé d’un capteur d’activité permet d’identifier le nombre de prises alimentaires ou encore le temps de rumination. « On a pu repérer des cas d’acétonémie en partant du constat que les vaches faisaient trop peu de prises alimentaires. L’éleveur a augmenté les apports énergétiques immédiatement. Il a pu agir 10 jours avant que les symptômes cliniques ne commencent à apparaître », commente Pierre Lechevallier, responsable zootechnique chez Medria, société spécialisée dans le monitoring. On voit bien tout l’intérêt de la surveillance.